ce d'une
poetique superficielle et meticuleuse, dont Corneille s'inquietait
outre mesure, et vous aurez le secret de tout ce qu'il y a de louche,
d'indecis et d'incompletement calcule dans l'ordonnance de ses
tragedies. Ses _Discours_ et ses _Examens_ nous donnent sur ce sujet
mille details, ou se revelent les coins les plus caches de l'esprit
du grand Corneille. On y voit combien l'impitoyable unite de lieu le
tracasse, combien il lui dirait de grand coeur: _Oh! que vous me genez!_
et avec quel soin il cherche a la reconcilier avec la _bienseance_. Il
n'y parvient pas toujours. _Pauline vient jusque dans une antichambre
pour trouver Severe dont elle devrait attendre la visite dans son
cabinet._ Pompee semble s'ecarter un peu de la prudence d'un general
d'armee, lorsque, sur la foi de Sertorius, il vient conferer avec lui
jusqu'au sein d'une ville ou celui-ci est le maitre; _mais il etait
impossible de garder l'unite de lieu sans lui faire faire cette
echappee._ Quand il y avait pourtant necessite absolue que l'action
se passat en deux lieux differents, voici l'expedient qu'imaginait
Corneille pour eluder la regle: "C'etoit que ces deux lieux n'eussent
point besoin de diverses decorations, et qu'aucun des deux ne fut jamais
nomme, mais seulement le lieu general ou tous les deux sont compris,
comme Paris, Rome; Lyon, Constantinople, etc. Cela aideroit a tromper
l'auditeur qui, ne voyant rien qui lui marquat la diversite des lieux,
ne s'en apercevroit pas, a moins d'une reflexion malicieuse et critique,
dont il y a peu qui soient capables, la plupart s'attachant avec chaleur
a l'action qu'ils voient representer." Il se felicite presque comme
un enfant de la complexite d'_Heraclius_, et que _ce poeme soit si
embarrasse qu'il demande une merveilleuse attention._ Ce qu'il nous fait
surtout remarquer dans _Othon_, _c'est qu'on n'a point encore vu de
piece ou il se propose tant de mariages pour n'en conclure aucun._
Les personnages de Corneille sont grands, genereux, vaillants, tout en
dehors, hauts de tete et nobles de coeur. Nourris la plupart dans
une discipline austere, ils ont sans cesse a la bouche des maximes
auxquelles ils rangent leur vie; et comme ils ne s'en ecartent jamais,
on n'a pas de peine a les saisir; un coup d'oeil suffit: ce qui est
presque le contraire des personnages de Shakspeare et des caracteres
humains en cette vie. La moralite de ses heros est sans tache: comme
peres, comme amants, comme amis ou enn
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