riant au secours comme si on voulait
l'assassiner. Aux questions des premiers qui l'interrogerent, il
repondit:
--Le capitaine! vite! vite! le capitaine! _Vole argent moi, my money!
Spitsboef! Donderwatter! moi vole!_ Oh! mon Dieu, mon Dieu, ma pauvre
argent!...
Quand le capitaine comprit ce qui desesperait si fort Donat, il prit le
fait tres au serieux. On avait, d'apres le recit du paysan, force,
pendant la nuit, la serrure de son sac de voyage et vole une somme de
cinq cents francs en quatre billets de banque anglais.
Tous les passagers de la troisieme classe furent appeles sur le pont et
minutieusement fouilles par les marins. On leur fit meme vider leurs
poches et oter leurs souliers. Ensuite, toutes les malles et les coffres
furent ouverts et visites; mais, quoi qu'on fit pour decouvrir l'auteur
de ce vol, on ne put trouver la trace des billets de banque disparus.
Donat Kwik pleurait comme un enfant, s'arrachait les cheveux et
remplissait l'air de ses plaintes ameres. Ses amis, Creps et Roozeman,
s'efforcerent de le consoler en lui assurant qu'il finirait bien par
retrouver ses billets de banque; et comme cela ne faisait pas d'effet
sur le paysan decourage, ils lui firent comprendre qu'en Californie il
n'aurait nullement besoin d'argent, et qu'il ne saurait meme pas
l'employer. En effet, a leur arrivee, ils trouveraient des delegues de
la societe _la Californienne_, pour leur procurer une bonne nourriture,
des auberges confortables et tout ce qui pouvait etre necessaire a leur
entretien.
Il ne fut cependant pas possible de tirer Kwik de son abattement.
Roozeman, que le vieux capitaine Morello n'avait pas laisse partir sans
argent, possedait mille francs dans son portefeuille. Il prit un billet
de banque de cent vingt-cinq francs et l'offrit au pauvre desole, qui
deplorait encore, avec des larmes aux yeux, la perte de sa _poire pour
la soif_. Donat accepta le don avec une grande reconnaissance et parut
un peu console. Neanmoins, depuis ce jour, il n'eut qu'une triste vie
sur le navire. Ou qu'il se trouvat, dans l'interieur ou sur le pont, il
espionnait tout ce qu'il voyait et entendait; il se glissait comme un
renard pour ecouter les conversations les plus secretes, suivait tous
les mouvements des mains des passagers, et il etait evident qu'il ne
regardait jamais quelqu'un sans que la pensee que le voleur de ses
billets de banque pouvait bien etre devant lui brillat dans ses yeux.
Les passagers, blesses
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