rane de M.
Stangerson, toutes pourraient se traduire par ces mots qu'on lui
adresserait, a elle: "Oh! toi qui connais le mystere, explique-le-
nous, et nous te sauverons peut-etre!" Ah! comme je voudrais la
sauver... d'elle-meme, et de l'autre! ... J'en pleure... Oui, je
sens mes yeux se remplir de larmes devant tant de misere si
horriblement cachee.
Elle est la, celle qui a le parfum de "la dame en noir"... je la
vois enfin, chez elle, dans sa chambre, dans cette chambre ou elle
n'a pas voulu me recevoir... dans cette chambre "ou elle se tait",
ou elle continue de se taire. Depuis l'heure fatale de la "Chambre
Jaune", nous tournons autour de cette femme invisible et muette
pour savoir ce qu'elle sait. Notre desir, notre volonte de savoir
doivent lui etre un supplice de plus. Qui nous dit que, si "nous
apprenons", la connaissance de "son" mystere ne sera pas le signal
d'un drame plus epouvantable que ceux qui se sont deja deroules
ici? Qui nous dit qu'elle n'en mourra pas? Et cependant, elle a
failli mourir... et nous ne savons rien... Ou plutot il y en a qui
ne savent rien... mais moi... si je savais "qui", je saurais
tout... Qui? qui? qui? ... et ne sachant pas qui, je dois me
taire, par pitie pour elle, car il ne fait point de doute qu'elle
sait, elle, comment "il" s'est enfui, lui, de la "Chambre Jaune",
et cependant elle se tait. Pourquoi parlerais-je? Quand je saurai
qui, "je lui parlerai, a lui!"
Elle nous regarde maintenant... mais de loin... comme si nous
n'etions pas dans sa chambre... M. Stangerson rompt le silence. M.
Stangerson declare que, desormais, il ne quittera plus
l'appartement de sa fille. C'est en vain que celle-ci veut
s'opposer a cette volonte formelle, M. Stangerson tient bon. Il
s'y installera des cette nuit meme, dit-il. Sur quoi, uniquement
occupe de la sante de sa fille, il lui reproche de s'etre levee...
puis il lui tient soudain de petits discours enfantins... Il lui
sourit... il ne sait plus beaucoup ni ce qu'il dit, ni ce qu'il
fait... L'illustre professeur perd la tete... Il repete des mots
sans suite qui attestent le desarroi de son esprit... celui du
notre n'est guere moindre. Mlle Stangerson dit alors, avec une
voix si douloureuse, ces simples mots: "Mon pere! mon pere!" que
celui-ci eclate en sanglots. Le pere Jacques se mouche et Frederic
Larsan, lui-meme, est oblige de se detourner pour cacher son
emotion. Moi, je n'en peux plus... je ne pense plus, je ne sens
plus, je suis
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