dre.
Ce ne fut qu'un cri:
--Le prince Savine va epouser mademoiselle de Barizel.
C'etait ce que Savine voulait. On parlait de lui, on s'occupait de lui,
lorsqu'il paraissait quelque part, il avait la satisfaction enivrante
pour sa vanite de voir qu'il faisait sensation; il etait revenu a ses
beaux jours, Otchakoff serait eclipse.
Pensez-donc, un mariage entre le riche Savine et la belle Corysandre,
quel inepuisable sujet de conversation!
Il levait les yeux dans un mouvement d'extase, mais il ne repondait pas.
Cette femme adorable serait-elle la sienne? Serait-il ce mari
bienheureux?
Cela ne faisait pas de doute pour aucun de ceux qui avaient assiste a
ces explosions d'enthousiasme, et cependant personne ne pouvait dire que
Savine s'etait nettement et formellement prononce a ce sujet.
Il voulut davantage, mais, sans s'engager, sans qu'un jour madame de
Barizel ou meme tout simplement le premier venu pussent s'appuyer sur un
fait positif et precis pour soutenir qu'il avait voulu etre le mari
de Corysandre, car il avait une peur effroyable des responsabilites,
quelles qu'elles fussent.
Si ordinairement et en tout ce qui ne lui etait pas personnel, il
n'avait que peu d'imagination, il se montrait au contraire fort
ingenieux et tres fertile en ressources, en inventions, en combinaisons
pour tout ce qui s'appliquait immediatement a ses interets ou devait les
servir.
Ce qu'il trouva ce fut une fete de nuit en pleine foret, avec bal et
souper, organisee en l'honneur de Corysandre. En choisissant un endroit
pittoresque qui ne fut pas trop eloigne de Bade, de facon qu'on put y
arriver facilement, il etait sur a l'avance de voir ses invitations
recherchees avec empressement. Sans doute la depense qu'entrainerait
cette fete serait grosse, et c'etait la pour lui une consideration a
peser; mais, tout compte fait, elle ne lui couterait pas plus qu'une
seance malheureuse, comme celles qu'il avait eues en ces derniers temps
a la table de trente-et-quarante, et l'effet produit ne pouvait pas
manquer d'etre considerable et retentissant. D'ailleurs il n'etait pas
dans son intention de prodiguer ses invitations: plus elles seraient
rares, plus elles seraient precieuses, et les malheureux qu'il ferait
parleraient de lui autant que les heureux,--ce qu'il voulait.
Apres avoir soigneusement etudie les environs de Bade, l'emplacement
qu'il adopta fut un petit plateau boise situe entre le vieux chateau
et l'entassement de
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