ctifs qu'il demanda une
petite addition, non pour parler de sa noblesse ou de sa fortune: elles
etaient, grace a Dieu, bien connues; mais pour qu'on rappelat son duel
avec le comte de San-Estevan et pour qu'on glissat un mot discret sur la
fermete et le courage qu'il avait montres en cette circonstance.
Avec le quatrieme, l'addition ne dut porter ni sur la noblesse, ni sur
la fortune, ni sur son courage, toutes choses qui, grace a Dieu, etaient
de notoriete publique, mais sur sa generosite; parce qu'il donnait des
fetes qui lui coutaient fort cher, il ne voulait pas qu'on crut qu'il ne
pensait pas aux malheureux.
Otchakoff etait battu.
IV
On ne pouvait pas parler ainsi du mariage de Savine avec la belle
Corysandre sans que ce bruit arrivat aux oreilles de la personne qui
justement avait le plus grand interet a l'apprendre: Raphaelle, la
maitresse du prince, retenue a Paris par le role qu'elle jouait dans une
piece en vogue, et aussi parce que son amant n'avait pas voulu l'emmener
avec lui.
Mais elle connaissait trop bien son prince pour admettre que ce mariage
fut possible: Savine ne se marierait que quand il serait impotent, et
ce serait pour avoir une garde-malade sure, dont il provoquerait
la sollicitude, l'interet et les soins par toutes sortes de belles
promesses, que naturellement il ne tiendrait pas. Quant a penser qu'il
etait pris par l'amour et la passion, cette idee etait pour elle si
drole et si invraisemblable qu'elle ne s'y arretait meme pas: Savine
amoureux, Savine passionne; cela la faisait rire aux eclats.
Ce fut meme par un de ces eclats de rire qu'elle accueillit la premiere
fois cette nouvelle, quand une de ses bonnes amies vint la lui annoncer
hypocritement avec des larmes dans la voix, mais aussi avec la juste
satisfaction dans le coeur qu'eprouve une pauvre femme qui n'a pas eu en
ce monde la chance a laquelle elle avait droit, a voir enfin abaissee
une de celles qui lui ont vole sa part de bonheur.
Cependant, a la longue et peu a peu, a force d'entendre et de lire
le meme mot sans cesse repete, "le mariage du prince Savine avec
mademoiselle de Barizel", elle finit par s'inquieter. Un bruit aussi
persistant ne pouvait pas se propager ainsi sans reposer sur quelque
chose de serieux.
La prudence exigeait qu'elle vit clair en cette affaire.
Ce n'etait point un role facile a remplir que celui de maitresse de Son
Excellence le prince Vladimir Savine; elle le savait mieux que pers
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