percus, il en est d'autres qui ne
peuvent faire un pas sans provoquer le tapage et la curiosite.
Cependant, leur installation fort modeste dans un petit chalet des
allees de Lichtenthal n'avait rien du faste insolent de quelques
etrangers qui semblent n'etre venus a Bade que pour y trouver le plaisir
de depenser leur argent avec ostentation: trois domestiques noirs, un
homme et deux femmes; une caleche louee au mois; il n'y avait certes pas
la de quoi forcer l'attention; avec cela un cercle de relations assez
banal, une loge au theatre, une heure de station a la musique, une
promenade rapide dans les salons de la Conversation sans jamais risquer
un florin a la table de la roulette, tous les matins la messe a l'eglise
catholique, c'etait tout.
Il etait impossible de mener une vie plus simple et cependant...
Cependant toutes les fois que madame de Barizel et sa fille se
montraient quelque part, il n'y avait plus d'yeux que pour elles ou
tout au moins pour Corysandre, et instantanement c'etait d'elles qu'on
s'occupait.
--Pourquoi parle-t-on tant d'elle, meme dans les journaux?
--Notre temps est celui de la reclame; tout finit par se placer avec
des annonces bien faites et souvent repetees: la mere s'entoure de
journalistes.
S'il n'etait pas rigoureusement exact de dire que madame de Barizel
recherchait les journalistes, au moins etait-ce vrai en partie et
particulierement pour un correspondant de journaux francais et
americains nomme Leplaquet.
Ancien medecin dans la marine de l'Etat, ancien directeur d'un journal
francais a Baton-Rouge, Leplaquet etait bien reellement le commensal de
madame de Barizel et en quelque sorte son homme d'affaires, au moins
pour certaines affaires. On disait et il le racontait lui-meme, qu'il
l'avait connue en Amerique, ou il avait ete son ami et plus encore l'ami
de M. de Barizel; a propos de cette liaison ancienne il etait meme plein
d'histoires plus ou moins interessantes qu'il contait volontiers, meme
sans qu'on les lui demandat, et dans lesquelles la grosse fortune et la
haute situation de son ami le comte de Barizel, un type d'honneur
et d'intrepidite, remplissaient toujours une place considerable; en
Amerique, ou lui Leplaquet, etait un personnage, il n'avait connu que
des personnages, et parmi les plus eleves, son bon ami Barizel.
Ces histoires, on les ecoutait parce qu'elles etaient generalement bien
dites et avec une verve meridionale qui s'imposait; mais on les eut
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