vrete d'esprit
et de vanite. Cette soumission se fait volontairement. Et de meme qu'on
n'a pas le droit de nous soumettre par force a une autorite quelconque,
de meme on n'a pas le droit de nous empecher de nous soustraire a cette
autorite.
Quand et pourquoi recherche-t-on la societe des autres? Parce que seul,
isole, on ne parviendrait pas a vivre et qu'on a besoin d'aide. Si nous
pouvions nous suffire a nous-memes, nous ne songerions jamais a nous
faire aider par d'autres. C'est l'interet qui pousse les hommes a faire
dependre leur volonte, dans des limites tracees d'avance, de la volonte
d'autres hommes. Mais toujours nous devons etre libres de reprendre
notre liberte individuelle des que les liens que nous avons acceptes
librement et qui ne nous serraient pas, commencent a nous gener, car un
jour viendra ou peut venir ou ces liens seront tellement lourds que nous
tacherons de nous en delivrer. La satisfaction de nos besoins est donc
le but de la reglementation de la societe. S'il est possible d'y arriver
d'une maniere differente et meilleure, chaque individu doit pouvoir se
separer du groupe dans lequel il lui a ete jusque-la le plus facile de
contenter ses besoins et se rallier a un autre groupe qui, d'apres lui,
repond mieux au but qu'il veut atteindre. Rien ne repugne plus a l'homme
libre que de devoir remplir une tache dont l'accomplissement est rendu
obligatoire par la force; chaque fois meme que sa conviction personnelle
ne considere pas cette tache comme un devoir, il la regarde comme un mal
et s'efforce de ne pas l'accomplir. La contrainte de l'Etat--qu'il
s'agisse d'un despote, du suffrage universel ou de n'importe quoi--est
la plus odieuse de toutes, parce qu'on ne peut s'y soustraire. Si je
suis membre d'une societe quelconque qui prend des resolutions
contraires a mes opinions, je puis demissionner. Ceci n'est pas le cas
pour l'Etat. Presque toujours il est impossible de quitter l'Etat,
c'est-a-dire le pays. Si c'est un independant qui cherche a le faire, il
doit abandonner tout ce qui le retient au pays, au peuple, car les
frontieres de l'Etat sont les frontieres du pays, du peuple. Et
d'ailleurs, on ne peut quitter un Etat sans sentir aussitot le joug d'un
autre Etat. On peut ne plus etre Hollandais, mais on devient Belge,
Allemand, Francais, etc. Quand on est coreligionnaire de l'Eglise
reformee, personne ne vous force, lorsque vous la quittez, de devenir
membre d'une autre Eglise, mais on ne peut ce
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