sont-ce pas des victimes innocentes, ces enfants qui, dans les
faubourgs, se meurent lentement d'anemie parce que le pain est rare a la
maison, ces femmes qui, dans vos ateliers, palissent et s'epuisent pour
gagner quarante sous par jour, heureuses encore quand la misere ne les
force pas a se prostituer, ces vieillards dont vous avez fait des
machines a produire toute leur vie, et que vous jetez a la voirie et a
l'hopital quand leurs forces sont extenuees?
Ayez au moins le courage de vos crimes, messieurs les bourgeois, et
convenez que nos represailles sont grandement legitimes."
Ce qu'Emile Henry disait devant le jury, est-il vrai ou non? Il savait
tres bien que les foules, les ouvriers pour lesquels il a lutte, ne
comprendraient pas son acte, mais cependant il n'hesitait pas, car il
etait convaincu qu'il donnait sa vie pour une grande idee. Tous les
attentats jusqu'a lui furent des attentats politiques qu'on peut
comprendre facilement, il ouvrait l'ere des attentats sociaux, il fut le
precurseur de cette theorie, et c'est pour cela que la sympathie pour
son acte fut beaucoup moindre.
Il peut s'etre trompe, mais il etait un homme de coeur, qui souffrait en
voyant toutes les miseres, toutes les tueries dont la classe ouvriere
etait l'objet et quand il disait: "La bombe du cafe Terminus est la
reponse a toutes vos violations de la liberte, a vos arrestations, a vos
perquisitions, a vos lois sur la presse, a vos expulsions en masse
d'etrangers, a vos guillotinades", nous le comprenons et, nous aussi,
nous avons en nous ce sentiment de haine dont son coeur fut rempli.
On peut parler de la bombe stupide et aveugle, mais pourquoi pas du
fusil et du canon stupide de la classe possedante?
Nous croyons que la lutte serait facilitee si chaque tyran etait frappe
directement apres son premier acte de tyrannie, si chaque ministre qui
trompe le peuple etait tue, si chaque juge qui condamne des pauvres, des
innocents, etait assassine, si chaque patron, chaque capitaliste etait
poignarde apres un acte d'intolerable tyrannie.
Ces actes individuels repandraient l'horreur, la crainte et on a vu
toujours et partout que seulement ces deux choses armeront nos
adversaires: la violence ou bien la crainte de la violence. On ne doit
jamais oublier que la classe ouvriere est en etat de defense. Elle est
toujours attaquee et quel est, dans la nature, l'etre qui n'essaie pas
de se defendre par tous les moyens possibles?
Cette theori
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