lois comme des
malfaiteurs, et peut-etre ne sont-ils autre chose que les pionniers
d'une societe meilleure, moins funeste que la notre.
Visitez les prisons, faites une enquete et que trouverez-vous?
Les neuf dixiemes des malfaiteurs enfermes derriere des portes
verrouillees ont faute (si cela s'appelle fauter) par misere; leur crime
consiste en leur pauvrete et en ce qu'ils ont prefere tendre la main et
prendre le necessaire plutot que de mourir de faim, obscurement,
tranquillement, sans protester. Ils ont attaque le droit sacro-saint de
la propriete, ils n'ont pas voulu se soumettre a un regime d'ordre
qu'ils n'ont pas cree et auquel ils refusent de se conformer.
Le professeur Albert Lange a ecrit quelques mots qui sont dignes d'etre
portes, sur les ailes du vent, jusqu'aux confins de la terre. Les voici:
Il n'y a pas a attendre qu'un homme se soumette a un regime d'ordre a la
creation duquel il n'a pas collabore, ordre qui ne lui donne aucune
participation aux productions et jouissances de la societe et lui prend
meme les moyens de se les procurer par son travail dans une partie
quelconque du monde, aussi peu qu'on puisse attendre qu'un homme dont
la tete est mise a prix tienne le moindre compte de ceux qui le
persecutent. La societe doit comprendre que ces desherites, qui sortent
de son sein, s'inspireront du droit du plus fort; s'ils sont nombreux,
ils renverseront le regime existant et en erigeront un autre sur les
ruines, sans se preoccuper s'il est meilleur ou pire. La societe ne peut
faire excuser la perpetuation de son droit qu'en s'efforcant
continuellement de l'appliquer a tous les besoins, en supprimant les
causes qui font manquer a tout droit d'atteindre son but, et meme, en
cas de besoin, en donnant au droit existant une base nouvelle.
Qu'on essaie seulement de renverser cette these et l'on s'apercevra
qu'elle est irrefutable.
C'est ainsi qu'on est force moralement d'accepter un regime d'ordre qui
force a souffrir de la faim, de la misere, a avoir des soucis, des
tourments.
Quelqu'un a faim: la loi de la nature lui dit qu'il doit satisfaire aux
besoins de son estomac. Il voit de la nourriture qui convient a ces
besoins, la prend, est arrete et mis en prison.
Au cas ou son esprit n'est pas encore fausse par la morale, qu'on tache
d'expliquer a cet homme qu'il a mal agi, qu'il a commis une mauvaise
action, qu'il est un malfaiteur,... il ne le comprendra pas.
On parle de voleurs; mais qu'est-
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