ouver le contraire, car jamais une classe ne se supprimera
volontairement. Chaque individu, chaque groupe lutte pour l'existence,
c'est la loi de la nature, qui fait du droit de defense et de
resistance, le plus sacre de tous les droits.
Le socialisme veut l'expropriation des exploiteurs. Eh bien, peut-on
penser que les patrons, les marchands, les proprietaires, en un mot les
capitalistes dont la propriete privee sera transformee en propriete
sociale ou commune, cederont jamais volontairement. Non, ils se
defendront par tous les moyens possibles plutot que de perdre leur
position preponderante. On les soumettra seulement par la violence.
Tout pouvoir a en soi un germe de corruption, et c'est pourquoi il faut
lutter non seulement contre le pouvoir d'aujourd'hui mais aussi contre
celui de l'avenir. Stuart Mill a tres bien dit: "le pouvoir corrompt
l'homme. C'est la tradition du monde entier, basee sur l'experience
generale".
Et parce que nous connaissons l'influence pernicieuse que l'autorite a
sur le caractere de l'individu, il faut lutter contre l'autorite.
Guillaume de Greef a formule tout le programme de l'avenir d'une maniere
aussi claire que nette en ces mots: Liberte, instruction et bien-etre
pour tous; "le principe, aujourd'hui, n'est plus contestable: la societe
n'a que des organes et des fonctions; elle ne doit plus avoir de
maitres." Et pourquoi l'homme, doue de plus de raison que les autres
etres dans la nature, ne serait-il pas capable de vivre dans une societe
sans autorite, lorsqu'on voit les fourmis et les abeilles former de
telles societes? Dans son _Evolution politique_, Letourneau nous dit:
"Au point de vue sociologique, ce qui est particulierement interessant
dans les republiques des fourmis et des abeilles, c'est le parfait
maintien de l'ordre social avec une anarchie complete. Nul gouvernement;
personne n'obeit a personne, et cependant tout le monde s'acquitte de
ses devoirs civiques avec un zele infatigable; l'egoisme semble
inconnu: il est remplace par un large amour social."
Nous n'allons pas examiner ici s'il est vrai que la propriete privee est
une modalite particuliere de l'autorite et si l'autorite est la source
de tous les maux dans la societe, comme le pense Sebastien Faure; ou
bien si la propriete privee est la cause de l'autorite, car nous sommes
d'avis que l'une et l'autre de ces propositions sont serieuses, qu'on
peut soutenir les deux theses, car elles se tiennent. Peut-etre est-
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