naturelles qui se manifestent dans
l'enchainement et dans la succession fatale des phenomenes du monde
physique et du monde social? En effet, contre les lois, la revolte est
non seulement defendue, mais elle est encore impossible. Mous pouvons
les meconnaitre ou ne point encore les connaitre, mais nous ne pouvons
pas leur desobeir, parce qu'elles consument la base et les conditions
memes de notre existence: elles nous enveloppent, nous penetrent,
reglent tous nos mouvements, nos pensees et nos actes; alors meme que
nous croyons leur desobeir, nous ne faisons autre chose que manifester
leur toute-puissance.
Oui, nous sommes absolument les esclaves de ces lois. Mais il n'y a rien
d'humiliant dans cet esclavage. Car l'esclavage suppose un maitre
exterieur, un legislateur qui se trouve en dehors de celui auquel il
commande; tandis que ces lois ne sont pas en dehors de nous: elles nous
sont inherentes, elles constituent notre etre, tout notre etre,
corporellement, intellectuellement et moralement: nous ne vivons, nous
ne respirons, nous n'agissons, nous ne pensons, nous ne voulons que par
elles. En dehors d'elles, nous ne sommes rien, _nous ne sommes pas_.
D'ou nous viendrait donc le pouvoir et le vouloir de nous revolter
contre elles? Vis-a-vis des lois naturelles, il n'est pour l'homme
qu'une seule liberte possible: c'est de les reconnaitre et de les
appliquer toujours davantage, conformement au but d'emancipation ou
d'humanisation collective et individuelle qu'il poursuit."
On ne peut reagir contre cette autorite-la. On pourrait dire: C'est
l'autorite naturelle ou plutot l'influence naturelle de l'un sur l'autre
a laquelle nous ne pouvons nous soustraire et a laquelle nous nous
soumettons, presque toujours sans le savoir.
En quoi consiste la liberte?
Bakounine repond: "La liberte de l'homme consiste uniquement en ceci:
qu'il obeit aux lois naturelles, parce qu'il les a reconnues _lui-meme_
comme telles et non parce qu'elles lui ont ete exterieurement imposees
par une volonte etrangere, divine ou humaine, collective ou individuelle
quelconque. Nous reconnaissons donc l'autorite absolue de la science,
parce que la science n'a d'autre objet que la reproduction mentale,
reflechie et aussi systematique que possible des lois naturelles qui
sont inherentes a la vie materielle, intellectuelle et morale, tant du
monde physique que du monde social, ces deux mondes ne constituant, dans
le fait, qu'un seul et meme monde natur
|