inq silhouettes noires se
decoupaient a l'horizon. Il nous suffit d'un coup d'oeil pour reconnaitre
des buffalos. Au moment ou Saint-Vrain parlait, nous etions en train de
desseller nos chevaux. Reboucler les sangles, rabattre les etriers, sauter
en selle et s'elancer au galop fut l'affaire d'un moment. La moitie
d'entre nous environ partit: quelques-uns, comme moi, pour le simple
plaisir de courir, tandis que d'autres, vieux chasseurs, semblaient sentir
la chair fraiche. Nous n'avions fait qu'une faible journee de marche; nos
chevaux etaient encore tout frais, et en trois fois l'espace de quelques
minutes, les trois milles qui nous separaient des betes fauves furent
reduits a un. La nous fumes _eventes._ Plusieurs d'entre nous, et j'etais
du nombre, n'ayant pas l'experience de la prairie, dedaignant les avis,
ayant galope droit en avant, et les buffalos, ouvrant leurs narines au
vent, nous avaient sentis. L'un d'eux leva sa tete velue, renifla, frappa
le sol de son sabot, se roula par terre, se releva de nouveau, et partit
rapidement, suivi de ses quatre compagnons. Il ne nous restait plus
d'autre alternative que d'abandonner la chasse, ou de lancer nos chevaux
sur les traces des buffalos. Nous primes ce dernier parti, et nous
pressames notre galop. Tout a la fois, nous nous dirigions vers une ligne
qui nous faisait l'effet d'un mur de terre de six pieds de haut. C'etait
comme une immense marche d'escalier qui separait deux plateaux, et qui
s'etendait a droite et a gauche aussi loin que l'oeil pouvait atteindre,
sans la moindre apparence de breche. Cet obstacle nous forca de retenir
les renes et nous fit hesiter. Quelques-uns firent demi-tour et s'en
allerent, tandis qu'une demi-douzaine, mieux montes, parmi lesquels
Saint-Vrain, mon voyageur Gode et moi, ne voulant pas renoncer si aisement
a la chasse, nous piquames des deux et parvinmes a franchir l'escarpement.
De ce point nous eumes encore a courir cinq milles au grand galop, nos
chevaux blanchissant d'ecume, pour atteindre le dernier de la bande, une
jeune femelle, qui tomba percee d'autant de balles que nous etions de
chasseurs a sa poursuite. Comme les autres avaient gagne pas mal d'avance,
et que nous avions assez de viande pour tous, nous nous arretames, et,
descendant de cheval, nous procedames au depouillement de la bete.
L'operation fut bientot terminee sous l'habile couteau des chasseurs. Nous
avions alors le loisir de regarder en arriere et de calculer la di
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