tiez un homme.
Je me suis trompee. N'en parlons plus. Pourtant, moi qui ne suis qu'une
femme, je ne laisserais pas la mort de ma mere sans vengeance.
--Ma mere! dit le Torero d'un air egare.
--Oui, votre mere! Morte assassinee par celui qui vous assassinera,
puisque vous tremblez a la seule pensee de frapper.
--Ma mere! repeta le Tcrero en crispant les poings avec fureur. Mais
le tuer, lui, mon pere!... C'est impossible! J'aime mieux qu'il me tue
moi-meme.
Fausta comprit qu'insister davantage risquait de lui faire perdre le
terrain gagne dans cet esprit. Avec une souplesse admirable, elle
changea de tactique, et avec un haussement d'epaules:
--Eh! fit-elle avec une certaine impatience, qui vous parle de tuer?
--Cependant, vous avez dit...
--J'ai dit: il faut frapper. Je n'ai pas dit, je n'ai pas voulu dire: il
faut tuer.
Le Torero eut un soupir de soulagement d'une eloquence muette. Ses
traits convulses se rasserenerent, et, pour cacher son desarroi, il
s'excusa en disant:
--Pardonnez ma nervosite, madame.
--Elle me parait naturelle, dit gravement Fausta, Je vais parler
clairement. Ce que le roi craint par-dessus tout, c'est que l'on
apprenne que vous etes son fils legitime et l'heritier de sa couronne.
Il eut pu employer la procedure usuelle. Cela lui eut simplifie la
besogne en lui permettant de vous frapper plus surement peut-etre. Mais,
si secret que soit un jugement, si dociles que soient des magistrats,
qui peut jurer qu'une indiscretion ne sera pas commise?
--Cependant, vous disiez tout a l'heure que j'etais menace d'une
arrestation suivie d'une condamnation a mort, naturellement.
--Oui. Mais le roi ne se resoudra a cette extremite que lorsqu'il lui
sera dument demontre qu'il ne peut vous atteindre autrement. Vous pouvez
plus que vous ne pensez. D'abord exploiter cette terreur du roi au sujet
de la divulgation de votre naissance.
--Comment? Excusez-moi, madame, je ne comprends pas grand-chose a toutes
ces complications. La pensee que je suis reduit a comploter bassement
contre mon propre pere, cette pensee m'est aussi douloureuse qu'odieuse,
et j'avoue qu'elle m'enleve toute ma lucidite.
--Je comprends vos scrupules et je les approuve.
Encore ne faudrait-il pas les pousser a l'extreme. Helas! je concois que
votre coeur soit dechire, mais, si douloureux pour vous, si penible pour
moi que cela soit, je dois insister. Il y va de votre salut. Je vous dis
donc: Ne vous obstinez pas a
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