eurs.
Peut-etre se fut-elle inquietee du soin avec lequel tous, galants
cavaliers qui l'avaient, pour ainsi dire, poussee jusqu'a cette place
d'honneur, peut-etre eut-elle eprouve quelque apprehension a la vue de
ces mines patibulaires.
Peut-etre, si elle avait regarde plus attentivement les malgre la
chaleur torride, se drapaient soigneusement dans de grandes capes,
deteintes par les pluies et le soleil. Et, si elle avait pu voir le bas
de ces capes releve par des rapieres demesurement longues, les ceintures
garnies de dagues de toutes les dimensions, son etonnement et son
inquietude se fussent indubitablement changes en effroi.
Mais la Giralda, toute a son bonheur de se voir si merveilleusement
placee, ne remarqua rien.
Pardaillan etait parti de l'hotellerie vers les deux heures. La course
devant commencer a trois heures, il avait une heure devant lui pour
franchir une distance qu'il eut pu facilement parcourir en un quart
d'heure.
Derriere lui marchait un moine qui ne paraissait pas se soucier du
gentilhomme qui le precedait, trop occupe qu'il etait a egrener un
enorme chapelet qu'il avait a la main. Seulement, de distance en
distance, principalement au croisement de deux rues, le moine faisait
un signe imperceptible, tantot a quelque mendiant, tantot a un soldat,
tantot a un religieux, et le mendiant, le soldat ou le religieux,
apres avoir repondu par un autre signe, s'elancait aussitot vers une
destination inconnue.
Pardaillan allait le nez au vent, sans se presser. Il avait le temps,
que diable! N'etait-il pas invite directement par le roi en personne?
Il ferait beau voir qu'on ne trouvat pas une place convenable pour le
representant de Sa Majeste le roi de France!
Quand a se dire qu'apres son algarade de l'avant-veille, ou il avait si
fort malmene, dans l'antichambre du roi, le seigneur Barba Roja, sous
les yeux memes de Sa Majeste a qui, pour comble, il avait parle de facon
plutot cavaliere; quant a se dire qu'il serait peut-etre prudent a lui
de ne pas se montrer a de puissants personnages qui, surement, devaient
lui vouloir la malemort, Pardaillan n'y pensa pas.
Pas davantage il ne pensa a Mme Fausta, qui, certainement, devait etre
furieuse d'avoir vu s'ecrouler le joli projet qu'elle avait forme de
le faire mourir de faim et de soif, plus furieuse encore de l'avoir vu
assommer a coups de banquette les estafiers qu'elle avait laches sur
lui, et de le voir se retirer, libre, sans une ecorchure
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