oir, il resta
un moment debout a sa place, promenant autour de lui des regards
fulgurants, ayant aux levres un sourire de mepris qui faisait verdir de
rage les nobles hidalgos retenus par le souci de l'etiquette.
A ce moment, les trompettes lancerent a toute volee, dans l'air
lumineux, l'eclat aigu de leurs notes cuivrees.
C'etait le signal impatiemment attendu par les milliers de spectateurs.
Mais, s'il eclatait a ce moment, c'etait par suite d'une meprise
deplorable: un geste du roi mal interprete.
Il n'en est pas moins vrai que les trompettes, sonnant au moment precis
ou Pardaillan allait s'asseoir, paraissaient saluer l'envoye du roi de
France.
C'est ce que comprit le roi, qui, pale de fureur, se tourna vers
Espinosa et laissa tomber un ordre bref, en execution duquel l'officier;
coupable d'avoir mal interprete les gestes du roi, et donne l'ordre aux
trompettes de sonner, fut incontinent arrete et mis aux fers.
Notre heros etait un incorrigible pince-sans-rire. Il trouva plaisant
de paraitre accepter comme un hommage rendu ce qui n'etait qu'un hasard
fortuit.
"Vive Dieu! dit-il a part soi, une politesse en vaut une autre."
Et, avec son sourire le plus naivement ingenu, mais au fond de l'oeil
l'intense jubilation de l'homme qui s'amuse prodigieusement, dans un
geste theatral qu'il etait seul a posseder, il adressa a la tribune
royale un salut d'une ampleur demesuree.
Pour comble de malchance, le roi, qui se retournait a ce moment pour
jeter l'ordre d'arreter l'officier qui avait fait sonner les trompettes,
le roi recut en plein le sourire et le salut de Pardaillan. Et, comme
c'etait un sire profondement dissimule, il dut, en se mordant les levres
de depit, repondre par un gracieux sourire, a seule fin de ne pas
contrarier le plan du grand inquisiteur, plan qu'il connaissait et
approuvait.
C'etait plus que n'esperait Pardaillan, qui s'assit alors paisiblement,
en jetant des coups d'oeil satisfaits autour de lui. Mais, comme si
un enchanteur avait passe par la, bouleversant de fond en comble les
sentiments intimes de ses feroces voisins, il ne vit autour de lui que
sourires engageants, regards bienveillants. Et, avec, aux levres, une
moue de dedain, il songea que le sourire que le roi venait de lui
accorder, moralement contraint et force, avait suffi pour changer la
haine en adulation.
VI
LE PLAN DE FAUSTA
Nous avons dit que le Torero s'etait trouve dans la desagreable
obligation de dre
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