is-Napoleon voulait faire un coup d'Etat pour devenir
empereur.
--Ce n'est pas l'ami du general Martory que je desire connaitre, c'est
sa fille.
--J'aurais voulu vous en parler, mais je ne sais rien d'elle ou tout au
moins peu de chose. Elle a perdu sa mere quand elle etait enfant et
elle a ete elevee a Saint-Denis, d'ou elle est revenue l'annee derniere
seulement. Cependant, puisque nous sommes sur son sujet, je veux ajouter
un mot, un avis, meme un conseil si vous le permettez: Ne pensez pas a
Clotilde Martory, ne vous occupez pas d'elle. Ce n'est pas du tout la
femme qu'il vous faut: le general n'a pour toute fortune que sa pension
de retraite, et il est gene, meme endette. Si vous voulez vous marier,
nous vous trouverons une femme qui vous permettra de soutenir votre nom.
Nous avons tous, dans notre famille, beaucoup d'amitie pour vous, mon
cher Saint-Neree, et ce sera, pour une Bedarrides, un honneur et un
bonheur d'apporter sa fortune a un mari tel que vous. Ce que je vous dis
la n'est point paroles en l'air; elles sont reflechies, au contraire, et
concertees. Mademoiselle Martory a pu vous eblouir, elle ne doit point
vous fixer.
IV
Ce n'etait pas la premiere fois qu'on me parlait ce langage dans la
famille Bedarrides, et deja bien souvent on avait de differentes
manieres aborde avec moi ce sujet du mariage.
--Il faut que nous mariions M. de Saint-Neree, disait madame Bedarrides
mere chaque fois que je la voyais. Qu'est-ce que nous lui proposerions
bien?
Et l'on cherchait parmi les jeunes filles qui etaient a marier. Je me
defendais tant que je pouvais, en declarant que je ne me sentais aucune
disposition pour le mariage, mais cela n'arretait pas les projets qui
continuaient leur course fantaisiste.
Les gens qui cherchent a vous convertir a leur foi religieuse ou a leurs
idees politiques deviennent heureusement de plus en plus rares chaque
jour, mais ceux qui veulent vous convertir a la pratique du mariage sont
toujours nombreux et empresses.
Le plus souvent, ils vivent dans leur interieur comme chien et chat;
peu importe: ils vous vantent serieusement les douceurs et les joies du
mariage. Ils vous connaissent a peine, pourtant ils veulent vous marier,
et il faudrait que vous eussiez vraiment bien mauvais caractere pour
refuser celle a laquelle ils ont eu la complaisance de penser pour vous.
C'est pour votre bonheur; acceptez les yeux fermes, quand ce ne serait
que pour leur faire plaisir.
|