nse a moi, n'est-ce pas, demanda-t-elle, avant de prendre
cette resolution, a ma douleur, a mon desespoir; tu as pense que je
pouvais en mourir.
Il inclina la tete.
--Et cependant tu l'as prise?
--J'ai du la prendre.
--Tu as du! C'est bien cela, je comprends; mais tu m'aimes, n'est-ce
pas; tu m'aimes encore!
--Si je t'aime!
La prenant dans ses bras, il l'etreignit passionnement; ils resterent
sans parler, les levres sur les levres.
Mais doucement elle se degagea:
--Ce que je te demande, je le savais avant que tu me le dises, je
l'avais senti, je l'avais devine, et c'est parce que je sentais bien que
tu m'aimais, que tu m'aimes toujours que je suis venue a toi, car
enfin nous ne pouvons pas etre separes,--j'en mourrais. Et toi,
supporterais-tu donc cette douleur? vivrais-tu sans moi? Pour moi, je ne
peux pas vivre sans toi, sans ton amour. Je le veux, il me le faut et je
viens te le demander. Ce que disait ta lettre, n'est-ce pas, c'etait que
je ne pouvais pas etre ta femme?
Il baissa la tete, ne pouvant pas repondre.
--Pourquoi ne reponds-tu pas? s'ecria-t-elle, pourquoi ne parles-tu
pas franchement? Tu as peur que je t'adresse des questions. Mais ces
questions m'epouvantent encore plus qu'elles ne peuvent t'epouvanter
toi-meme. En me disant que tu m'aimais toujours et que tu ne pouvais
pas faire de moi ta femme, tu m'as tout dit. Je ne veux pas en savoir
davantage. Il y a la quelque mystere, quelque secret terrible que je ne
dois pas connaitre puisque tu ne me l'as pas dit et que tu montres tant
d'inquietude a la pensee que je peux te le demander. Je ne suis qu'une
pauvre fille sans experience, je ne sais que bien peu de chose dans la
vie et du monde; mais, pour mon malheur, j'ai appris a regarder et
a voir, et ce que bien souvent je ne comprends pas, je le devine
cependant. Ce que j'ai devine c'est qu'apres avoir voulu me prendre pour
ta femme, tu ne le veux plus maintenant.
--Je ne le peux plus.
--Mais tu peux m'aimer cependant, tu m'aimes. Eh bien, ne nous separons
plus. Me voici; prends-moi, garde-moi.
Elle lui jeta les bras autour du cou, et le regardant sans baisser les
yeux:
--Me veux-tu?
--Et j'ai pu t'ecrire que nous ne nous verrions plus! s'ecria-t-il.
--Oh! ne t'accuse pas. A ta place j'aurais agi comme toi sans doute; a
la mienne tu ferais ce que je fais; tu as eu la douleur de resister a
ton amour, moi j'ai la joie d'obeir au mien. Et sens-tu comme elle est
grande, se
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