es qu'il avait entre
ses mains et au moyen desquelles il pouvait empecher son mariage avec
Dayelle s'il voulait s'en servir.
Il entra dans son salon le sourire aux levres, decide a se montrer bon
prince et a ne pas abuser des avantages de sa position: malgre tout elle
etait la mere de Corysandre.
Mais, ayant jete sur elle un rapide coup d'oeil, il remarqua qu'elle
aussi etait souriante et que son attitude, au lieu d'etre celle d'une
suppliante, etait plutot celle d'une femme sure d'elle-meme, qui peut
parler haut.
C'etait a elle d'entamer l'entretien et d'expliquer le but de sa
visite,--ce qu'elle fit sans aucun embarras.
--C'est une lettre que je vous apporte, dit-elle.
--Je vous remercie, madame de la peine que vous avez prise.
--Une lettre de la part de ma fille.
Avant de tendre cette lettre qu'elle tenait cachee, elle le regarda avec
un sourire ironique; ce ne fut qu'apres une pause assez longue qu'elle
la sortit de sa poche.
Il reconnut celle qu'il avait remise a Houssu et ne fut pas maitre de
retenir un mouvement.
--Mon Dieu oui, monsieur le duc, c'est la votre, dit-elle en accentuant
son sourire; l'agent que vous employez a paye des gens pour la faire
parvenir a ma fille, et celle-ci, ayant reconnu l'ecriture de l'adresse,
n'a pas cru devoir l'ouvrir: elle me l'a remise pour que je vous la
rapporte. Vous voyez que le cachet est intact, n'est-ce pas.
Puis, apres avoir joui pendant quelques instants de la confusion de
Roger, elle poursuivit:
--Comment n'avez-vous pas compris, que cet accueil etait le seul que
pouvait recevoir votre lettre? Elle serait arrivee le lendemain de la
visite de ma fille ici, il en eut ete sans doute autrement. Encore sous
l'influence de son coup de tete, Corysandre n'eut pas reflechi et elle
aurait ete peut-etre entrainee. Vous savez comme on persiste facilement
dans une folie; meme quand on sait que c'est une folie on s'y obstine.
Mais apres le temps qui s'est ecoule, apres votre long silence, elle
a pu reflechir; elle a envisage la situation, elle vous a juge, mal
peut-etre, mais enfin elle vous a juge tel que les circonstances vous
montraient et, a vrai dire, non a votre avantage. Songez donc qu'elle
avait ete prodigieusement etonnee et meme assez profondement blessee de
votre lenteur a vous declarer a Bade, ne comprenant rien a votre reserve
et se disant que vous etiez un amant bien compasse, bien froid, ce que
vous appelez, je crois, un amoureux transi. Est-c
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