e le mot?
Elle regarda toujours souriante, montrant ses dents blanches pointues;
puis comme il ne repondait pas, elle continua:
--Lorsque apres son depart d'ici et dans la solitude du couvent ou je
l'avais placee, elle a vu que vous ne faisiez rien pour l'arracher a
ce couvent et que vous continuiez a vous enfermer dans votre prudente
reserve, elle a trouve que de transi vous deveniez tout a fait glace. La
situation que vous me faisiez etait vraiment trop belle pour que je n'en
profite pas, et je vous avoue que j'en ai tire parti. Aux reflexions que
faisait ma fille j'ai ajoute les miennes, qui je l'avoue encore, n'ont
pas ete a votre avantage. Croyez-vous qu'il a ete difficile de prouver
a ma fille que vous ne l'aimiez pas, que vous ne l'aviez jamais aimee.
Est-ce que quand on aime une jeune fille, belle, honnete, tendre comme
Corysandre, on ne l'epouse pas malgre tout? Est-ce qu'on se laisse
arreter par je ne sais quelles considerations d'orgueil? Quand on aime,
il n'y a pas de considerations, il n'y a que l'amour. Est-ce que quand
cette jeune fille est mise dans un couvent, on la laisse s'y morfondre
et s'y desesperer? Si elle commence par la, elle finit par se consoler
et se laisser consoler. C'est ce qui est arrive. Apres avoir ecoute la
voix de la raison, Corysandre, qui ignorait que vous aviez charge un
agent de la decouvrir, a ecoute celle de la tendresse. Vous dites?
--Rien, madame; je vous ecoute, je vous admire.
--N'allez pas croire au moins que j'exagere. Il ne faut pas juger
Corysandre sur son coup de tete et voir en elle une fille exaltee et
passionnee, capable de tout dans un elan d'amour. Songez qu'elle a pu
etre poussee a ce coup de tete par une volonte au-dessus de la sienne,
qui croyait ainsi assurer son mariage.
--Ah! vous le reconnaissez?
--J'explique, rien de plus. Mais ce que je veux surtout vous faire
comprendre c'est la nature de ma fille. En realite c'est une personne
raisonnable, douce, tendre, qui a horreur des aventures, du desordre, de
la lutte et qui desire par-dessus tout une existence reguliere et calme.
L'eut-elle trouvee aupres de vous, cette existence? En devenant votre
femme, oui, sans doute; mais votre maitresse... On la lui a offerte...
elle l'a acceptee avec un coeur emu, plein de reconnaissance pour le
galant homme qui voulait bien oublier qu'elle avait eu une minute
d'egarement... rien qu'une minute. Aujourd'hui elle aime ce galant
homme,--la facon dont elle repond a
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