grand regret, impossible de donner suite au projet que
j'avais forme et dont je vous avais entretenu.
--Mais depuis que vous avez fait connaitre vos intentions a madame de
Barizel, il s'est passe un... incident grave qui a du les modifier.
--Il ne les a point modifiees.
--Vous m'etonnez, monsieur le duc; c'est un honnete homme qui vous le
dit.
Roger ouvrit la bouche pour remettre cet honnete homme a sa place; mais
il ne pouvait le faire qu'en accusant madame de Barizel, et il ne le
voulut pas.
--Monsieur le duc, continua Dayelle, qui paraissait eprouver un reel
plaisir a prononcer ce mot, monsieur le duc, c'est de mon propre
mouvement que je me suis decide a cette demarche aupres de vous, dans
l'interet de Corysandre que j'aime d'une affection tres vive; je viens
de voir madame de Barizel bien decidee a demander aux tribunaux la
reparation de l'injure sanglante que vous lui avez faite, je l'ai
arretee en la priant de me permettre de faire appel a votre honneur....
--C'est justement l'honneur qui m'empeche de poursuivre ce mariage, dit
Roger, incapable de retenir cette exclamation.
--Monsieur le duc, cela est grave; il y a dans vos paroles une
accusation terrible. Qui la justifie? Vous ne pouvez pas laisser mes
amies, madame de Barizel aussi bien que sa fille, sous le coup de cette
accusation tacite.
--J'ai donne a madame de Barizel les raisons qui me font rompre un
mariage que je desirais ardemment.
--Vous avez ecoute de basses calomnies, monsieur le duc.
Roger ne repondit pas.
Dayelle le pressa; Roger persista dans son silence, et il eut rompu
l'entretien s'il n'avait espere pouvoir trouver le moyen de savoir ou
etait Corysandre.
--Je suis surpris, monsieur le duc, que vous persistiez dans votre
inqualifiable refus de me donner des explications que je me croyais en
droit de demander a votre loyaute. Je venais a vous en conciliateur.
Vous avez tort de me repousser, car vous perdez Corysandre que vous
dites aimer.
--Que j'aime et qui m'aime.
--Sa mere a du la faire entrer dans un couvent, et si vous ne l'en
faites pas sortir en l'epousant, elle y restera enfermee jusqu'a sa
majorite, car vous sentez bien qu'apres ce proces elle ne pourrait
jamais se marier.
Roger, se raidissant contre son emotion, voulut essayer de suivre les
conseils de Nougaret:
--Alors nous attendrons cette majorite, dit-il, j'ai foi en elle comme
elle a foi en moi; par ce proces, madame de Barizel deshonorera sa
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