savoir qui etait cet homme, il fallait bien qu'il le lui demandat.
Aux premiers mots qu'il lui adressa a ce sujet, elle parut embarrassee;
mais bientot elle prit son parti.
--C'est que la personne dont tu me parles, dit-elle, ne fait pas son
metier de ces sortes d'affaires; c'est par amitie qu'elle a bien voulu
me rendre ce service; en un mot, c'est mon pere. Tu vois combien il est
delicat que je lui demande de faire pour toi ce qu'il a bien voulu faire
pour moi. Et puis, ce qui est delicat aussi, c'est de lui donner des
raisons pour justifier a ses propres yeux son intervention. Ces raisons,
je ne te les demande pas, elles ne me regardent pas. Mais lui, avant
d'agir, voudra savoir pourquoi il agit. C'est un homme meticuleux, qui
pousse certains scrupules a l'exageration; le type du vieux soldat.
Enfin je vais tacher de te l'envoyer; tu t'arrangeras avec lui.
Raphaelle reussit dans sa mission qu'elle presentait comme si delicate,
si difficile, et le lendemain matin Roger vit entrer M. Houssu, sangle
dans sa redingote boutonnee comme une tunique, les epaules effacees,
la poitrine bombee, avec un large ruban rouge sur le coeur. Il salua
militairement et, d'une voix breve:
--Monsieur le duc, je viens a vous de la part de ma fille... a qui je
n'ai rien a refuser. Elle m'a dit que vous aviez besoin de mes services
pour rechercher une jeune fille que sa mere ferait retenir injustement
dans un couvent. Je me mets donc a votre disposition, d'abord pour avoir
le plaisir de vous obliger,--il salua,--ensuite pour etre agreable a ma
fille,--il mit la main sur son coeur d'un air attendri,--enfin parce que
mes principes d'homme libre s'opposent a ces sequestrations dans les
couvents.
Comme Roger se souciait peu de connaitre les principes de M. Houssu, il
se hata de parler de la question de remuneration.
--A la vacation, monsieur le duc, dit Houssu avec bonhomie, a la
vacation, je vous compterai le temps passe a cette surveillance... et
mes frais, au plus juste.
Soit que Houssu voulut tirer a la vacation, soit toute autre raison, le
temps s'ecoula sans qu'il apportat aucun renseignement sur Corysandre;
cependant il etait bien certain qu'il s'occupait de cette surveillance
avec activite, car, s'il etait muet sur Corysandre, il etait d'une
prolixite inepuisable sur madame de Barizel, dont Roger pouvait suivre
la vie comme s'il l'avait partagee.
Mais ce n'etait pas de madame de Barizel qu'il s'inquietait, c'etait de
Co
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