s les bosquets pour
mieux voir les fusees.
C'etait un bizarre spectacle que celui de ces hommes marchant
comme par groupes, comme occupes chacun a quelque chose, et
pourtant attentifs a la parole d'un seul d'entre eux, qui, lui-
meme, ne semblait parler qu'a son voisin.
-- Messieurs, dit Fouquet, vous avez remarque, sans doute, que
deux de nos amis manquaient ce soir a la reunion du mercredi...
Pour Dieu! l'abbe, ne vous arretez pas, ce n'est pas necessaire
pour ecouter; marchez, de grace, avec vos airs de tete les plus
naturels, et comme vous avez la vue percante, mettez-vous a la
fenetre ouverte, et si quelqu'un revient vers la galerie,
prevenez-nous en toussant.
L'abbe obeit.
-- Je n'ai pas remarque les absents, dit Pellisson, qui, a ce
moment, tournait absolument le dos a Fouquet et marchait en sens
inverse.
-- Moi, dit Loret, je ne vois pas M. Lyodot, qui me fait ma
pension.
-- Et moi, dit l'abbe, a la fenetre, je ne vois pas mon cher
d'Emerys, qui me doit onze cents livres de notre dernier brelan.
-- Loret, continua Fouquet en marchant sombre et incline, vous ne
toucherez plus la pension de Lyodot; et vous, l'abbe, vous ne
toucherez jamais vos onze cents livres d'Emerys, car l'un et
l'autre vont mourir.
-- Mourir? s'ecria l'assemblee, arretee malgre elle dans son jeu
de scene par le mot terrible.
-- Remettez-vous, messieurs, dit Fouquet, car on nous epie peut-
etre... J'ai dit: mourir.
-- Mourir! repeta Pellisson, ces hommes que j'ai vus, il n'y a pas
six jours, pleins de sante, de gaiete, d'avenir. Qu'est-ce donc
que l'homme, bon Dieu! pour qu'une maladie le jette en bas tout
d'un coup?
-- Ce n'est pas la maladie, dit Fouquet.
-- Alors, il y a du remede, dit Loret.
-- Aucun remede. MM. de Lyodot et d'Emerys sont a la veille de
leur dernier jour.
-- De quoi ces messieurs meurent-ils, alors? s'ecria un officier.
-- Demandez a celui qui les tue, repliqua Fouquet.
-- Qui les tue! On les tue? s'ecria le choeur epouvante.
-- On fait mieux encore. On les pend! murmura Fouquet d'une voix
sinistre qui retentit comme un glas funebre dans cette riche
galerie, tout etincelante de tableaux, de fleurs, de velours et
d'or.
Involontairement chacun s'arreta; l'abbe quitta sa fenetre; les
premieres fusees du feu d'artifice commencaient a monter par-
dessus la cime des arbres.
Un long cri, parti des jardins, appela le surintendant a jouir du
coup d'oeil.
Il s'approcha d'une fenetr
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