aret meme en promenant
partout ses yeux qui semblaient percer les murs et les
consciences.
"Tiens, se dit d'Artagnan, mes locataires communiquent... Ah!
c'est sans doute encore quelque curieux de pendaison."
Au meme moment, les cris et le vacarme des buveurs cesserent dans
les chambres superieures. Le silence, en pareille circonstance,
surprend comme un redoublement de bruit. D'Artagnan voulut voir
quelle etait la cause de ce silence subit. Il vit alors que cet
homme, en habit de cavalier, venait d'entrer dans la chambre
principale et qu'il haranguait les buveurs, qui tous l'ecoutaient
avec une attention minutieuse. Son allocution, d'Artagnan l'eut
entendue peut-etre sans le bruit dominant des clameurs populaires
qui faisait un formidable accompagnement a la harangue de
l'orateur. Mais elle finit bientot, et tous les gens que contenait
le cabaret sortirent les uns apres les autres par petits groupes;
de telle sorte, cependant, qu'il n'en demeura que six dans la
chambre: l'un de ces six, l'homme a l'epee, prit a part le
cabaretier, l'occupant par des discours plus ou moins serieux,
tandis que les autres allumaient un grand feu dans l'atre: chose
assez etrange par le beau temps et la chaleur.
-- C'est singulier, dit d'Artagnan a Raoul; mais je connais ces
figures-la.
-- Ne trouvez-vous pas, dit Raoul, que cela sent la fumee ici?
-- Je trouve plutot que cela sent la conspiration, repliqua
d'Artagnan.
Il n'avait pas acheve que quatre de ces hommes etaient descendus
dans la cour, et, sans apparence de mauvais desseins, montaient la
garde aux environs de la porte de communication, en lancant par
intervalles a d'Artagnan des regards qui signifiaient beaucoup de
choses.
-- Mordioux! dit tout bas d'Artagnan a Raoul, il y a quelque
chose. Es-tu curieux, toi, Raoul?
-- C'est selon, monsieur le chevalier.
-- Moi, je suis curieux comme une vieille femme. Viens un peu sur
le devant, nous verrons le coup d'oeil de la place. Il y a gros a
parier que ce coup d'oeil va etre curieux.
-- Mais vous savez, monsieur le chevalier, que je ne veux pas me
faire le spectateur passif et indifferent de la mort de deux
pauvres diables.
-- Et moi donc, crois-tu que je sois un sauvage? Nous rentrerons
quand il sera temps de rentrer. Viens!
Ils s'acheminerent donc vers le corps de logis et se placerent
pres de la fenetre, qui, chose plus etrange encore que le reste,
etait demeuree inoccupee.
Les deux derniers buveurs, a
|