adre anglaise. Ils nous preparent quelque mechant tour.
Tandis qu'elle faisait ces reflexions, le chien se mit a aboyer avec
fureur.
La femme du garde regarda de nouveau devant elle. Il lui sembla voir remuer
quelque chose sur le haut de la dune.
--C'est l'ennemi! dit-elle en palissant.
Elle courut aupres du lit et reveilla son mari.
--Michel! Michel! cria-t-elle d'une voix tremblante, les Anglais!
--Les Anglais! repeta le sergent en ecartant brusquement les couvertures.
Tu as le cauchemar!
--Non. Ils sont debarques. Je les ai vus. Ils vont venir. Nous sommes
perdus!
--Nous le verrons bien! dit Cabieu en sautant dans la chambre.
Il chercha ses vetements dans l'obscurite et s'habilla a la hate. Le chien
ne cessait d'aboyer.
--Diable! diable! fit le garde-cote en riant, ils ne doivent pas etre loin.
M. Pitt reconnait ses compatriotes. Depuis qu'il est naturalise Francais,
il aime les Anglais autant que nous.
--Peux-tu plaisanter dans un pareil moment, Michel! dit la femme du
sergent.
En meme temps elle battait le briquet. Une gerbe d'etincelles brilla dans
l'ombre.
--N'allume pas la lampe! dit vivement le garde-cote; tu nous ferais
massacrer. Si les Anglais s'apercoivent que nous veillons, ils entoureront
la maison et nous egorgeront sans bruler une amorce.
--Que faire? dit la femme avec desespoir.
--Nous taire, ecouter et observer.
--Le chien va nous trahir.
--Je me charge de museler M. Pitt.
A ces mots, le sergent entre-bailla la porte et attira le dogue dans la
maison; puis il alla se mettre en observation derriere la haie de son
jardin.
La mere etait restee aupres du berceau. L'enfant dormait paisiblement et
revait sans doute aux jeux qu'il allait reprendre a son reveil. Il ne se
doutait pas du danger qui le menacait. Il songeait encore moins aux
angoisses de celle qui veillait a ses cotes, prete a sacrifier sa vie pour
le defendre.
Cabieu ne revenait pas. Sa femme s'inquieta; les minutes lui paraissaient
des siecles. Elle voulut avoir des nouvelles et sortit en refermant
doucement la porte derriere elle. A l'autre bout du jardin elle rencontra
son mari.
--Eh bien? lui dit-elle.
--Ils sont plus nombreux que je ne le pensais. Vois!
La femme regarda entre les branches que son mari ecartait.
--Ils s'eloignent! dit-elle avec joie.
--Il n'y a pas la de quoi se rejouir, murmura Cabieu.
--Pourquoi donc? Nous en voila debarrasses.
--C'est un mauvais sentiment cel
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