oir qu'une discussion venait de s'engager.
L'etranger voulait retenir Francois et sa mere; Marie l'appuyait en
l'encourageant du regard, car elle n'osait manifester librement le desir
qu'elle avait de garder Francois a souper. Mais la pauvre veuve les
remercia, les larmes aux yeux, pretextant que sa tristesse s'associerait
mal a la joie des convives. Francois hesitait, partage entre la crainte de
laisser sa mere dans l'isolement et les voeux qu'il faisait pour passer
encore quelques instants pres de son amie.
--Je sais le moyen de tout arranger, dit l'ancien camarade de Pierre
Vardouin en prenant le bras de l'apprenti. Nous allons, mere Regnault, vous
reconduire jusqu'a votre porte. Peut-etre vous deciderez-vous, dans le
trajet, a accepter l'invitation que je me permets de vous faire au nom de
mon vieil ami. En tout cas, je serai bien aise de parler un peu avec
Francois. Cela donnera a Marie le temps d'appreter le repas, et a son pere
celui de rentrer chez lui.
Marie applaudit a cette idee et entra dans la maison. Elle donna ses ordres
a la domestique de son pere; puis elle courut au jardin cueillir des
fraises et des groseilles qu'elle disposa avec cet art merveilleux, avec
cette poesie que les femmes savent apporter aux plus petits details du
menage. Il etait huit heures lorsqu'elle rentra dans la chambre du maitre
de l'oeuvre, et le soleil, incline a l'horizon, eclairait l'eglise de ses
derniers reflets. La table, deja dressee, attendait les convives. La jeune
fille roula la chaise de reception--le meuble le plus soigne de
l'appartement--pres de celle de Pierre Vardouin. Restait a fixer sa place
et celle de Francois.
Il etait tout simple de rapprocher les escabeaux de la table. Mais une
heureuse idee, une idee qui traverse la tete de tous les amoureux, sans
qu'ils osent se l'avouer, changea sa resolution. Une chaise, un fauteuil
conviennent, plus que tout autre meuble, aux vieillards. Ils y jouissent de
toute la liberte de leurs mouvements et n'ont pas a se defendre contre
l'empietement de leurs voisins. Ce n'est pas la le compte des amants. Un
canape, un sofa repondent mieux a leurs desirs. Le rapprochement des pieds
ou des mains, le frolement du bras contre la robe, quelquefois des boucles
de cheveux qui s'egarent et se confondent, autant de plaisirs, autant
d'innocentes folies qui trompent la surveillance des vieux parents. On ne
connaissait pas au treizieme siecle l'usage des canapes et des sofas; mais
des b
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