ards pour la vieillesse quand on ne sait meme pas
respecter sa mere.
--Je ne crois pas vous avoir manque de respect, repondit simplement
Germain.
--Je vous repete, poursuivit maitresse Gilles, que vous ne devez pas aller
contre mes volontes. Or, j'avais defendu ce matin a cette mechante fille de
monter sur Jacquot; quand on se leve a huit heures du matin pour aller
traire les vaches, on peut bien marcher a pied; car il n'y a plus de rosee
dans les champs.
--Ecoutez-moi, ma mere, dit Germain.
--J'ecoute, repondit maitresse Gilles du ton d'une personne qui a pris la
ferme resolution de se boucher les oreilles tout le temps qu'on lui fera
l'honneur de lui parler.
--En revenant ce matin de voir nos bles, dit Germain, j'ai rencontre
Elisabeth dans l'herbage ou sont les vaches; elle etait etendue a terre et
dormait profondement...
--C'est probablement pour dormir qu'on l'a louee!
--Elle s'est reveillee a mon approche et m'a dit qu'elle etait souffrante.
--Toujours l'excuse des paresseux!
--Et comme elle avait grand'peine a marcher, je n'ai cru faire que mon
devoir en l'engageant a monter sur Jacquot.
--Malgre ma defense!
--Je ne la connaissais pas... D'ailleurs, je pense que vous en auriez fait
tout autant a ma place, si vous aviez vu sa paleur et son abattement; car
je vous sais bon coeur.
--Je le crois pardine bien que j'ai bon coeur!... on en abuse assez!
repondit la fermiere qui ne parut pas tout a fait indifferente a ce
compliment.
Germain s'imaginait avoir gagne la cause d'Elisabeth. Malheureusement
maitre Gilles, qui avait observe de la fenetre de la cuisine ce qui se
passait dans la cour, eut la facheuse idee de venir se meler au debat. A la
vue de son mari, la fermiere se rappela la discussion qu'elle avait eue
avec lui, et sa mauvaise humeur prit des proportions telles qu'aucune
puissance humaine n'eut ete capable d'arreter le debordement de paroles qui
sortit de sa bouche.
--Bon! voila l'autre, maintenant! s'ecria-t-elle en lancant a son mari un
regard furieux... Ne suis-je pas la plus malheureuse des femmes! Mon fils
et mon mari se donnent la main pour me tourmenter. Mais, au lieu de me
faire mourir ainsi a petit feu, mettez-moi a la porte de chez nous!... Vous
pourrez alors garder votre Elisabeth, puisque vous avez besoin de cette
fille-la pour vivre... Oui, oui! c'est une excellente creature; elle n'est
pas paresseuse, elle n'est pas malhonnete, elle ne vole pas ses maitres,
c'es
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