un pied leste le banc de
gazon.
--Pardonnez-moi, dit le maitre de l'oeuvre, d'avoir surpris vos
confidences. Le hasard seul en est la cause. Ne craignez rien... je suis
discret. D'ailleurs, ajouta-t-il en s'adressant a Marie dont les joues se
coloraient du plus vif carmin, je n'ai rien entendu qui ne vous fasse
honneur a tous deux; et je trouve Pierre Vardouin tres-heureux d'avoir une
fille accomplie et un apprenti de si grande esperance.
Les deux jeunes gens se regarderent d'un air etonne.
--Ne soyez pas surpris de m'entendre parler de Pierre Vardouin, reprit
l'etranger en s'empressant de satisfaire leur curiosite. C'est un de mes
anciens et--je puis le dire--de mes meilleurs amis. Je ne voulais pas
quitter le pays sans aller lui serrer la main. Puisque le hasard vous a mis
sur ma route, je compte sur vous pour me conduire chez mon vieux camarade.
Tous trois reprirent le chemin du petit village de Norrey.
--Si je ne craignais de blesser votre modestie, continua le vieillard en
serrant cordialement la main de Francois, je vous dirais que votre maniere
d'apprecier notre art m'a vivement emu! Perseverez dans cette voie;
habituez votre esprit a penser, a observer. Il y a beaucoup a faire encore
dans l'etude que vous embrassez de si grand coeur. Le doute, cependant,
s'est glisse dans votre ame. Vous vous plaignez d'etre meconnu; votre
patron ne sait pas vous apprecier. Attendez! je connais de vieille date le
caractere de Vardouin; il est avare d'eloges, il n'est pas expansif, mais
il est juste, et je parierais qu'il a deja remarque vos heureuses
dispositions. Il est temps--j'en conviens--de placer dans vos mains le
baton du maitre de l'oeuvre et de vous donner des travaux a diriger. J'en
fais mon affaire. Ainsi, plus de decouragement. Ne vous lassez pas de
marcher a la recherche du beau. Vous subirez de longues fatigues; mais vous
arriverez enfin au but tant desire, parce que vous possedez le courage qui
triomphe des obstacles et l'inspiration qui fait les grandes choses!
Comme il achevait de parler, Magdeleine, inquiete de ne pas voir revenir
ses enfants, se presenta devant eux au detour du sentier. L'etranger se
chargea d'excuser les deux jeunes gens, en prenant sur lui la
responsabilite de leur retard, et les quatre promeneurs se haterent de
gagner Bretteville. Comme Pierre Vardouin n'etait pas encore rentre, ils
s'arreterent sous le porche de sa maison. A leurs gestes, a leur
physionomie, il etait facile de v
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