tes.
Il eut d'abord a comparaitre devant les parents et les amis rassembles, et
a y subir une sorte d'interrogatoire: non qu'il fut traite en coupable,
on lui temoignait au contraire toute l'indulgence possible; mais il lui
fallut mettre son coeur a nu et entendre discuter ses secrets les plus
chers; il est inutile de dire que l'on ne put rien decider. M. Hombert
voulut voir Bernerette; il alla chez elle, lui parla longtemps, et lui
fit mille questions auxquelles elle sut repondre avec une grace et une
naivete qui toucherent le vieillard. Il avait eu, comme tout le monde, ses
amourettes de jeunesse. Il sortit de cet entretien fort trouble et fort
inquiet. Il fit venir son fils, et lui dit qu'il etait decide a faire
un petit sacrifice en faveur de Bernerette, si elle promettait, quand
elle serait retablie, d'apprendre un metier. Frederic transmit cette
proposition a son amie.
--Et toi, que feras-tu? lui dit-elle; comptes-tu rester ou partir?
Il repondit qu'il resterait; mais ce n'etait pas l'avis de la famille.
Sur ce point, M. Hombert fut intraitable. Il representa a son fils le
danger, la honte, l'impossibilite d'une liaison pareille; il lui fit
sentir, en termes bienveillants et mesures, qu'il se perdait de
reputation, qu'il ruinait son avenir. Apres l'avoir force de reflechir,
il employa l'irresistible argument qui fait la toute-puissance paternelle:
il supplia son fils; celui-ci promit ce qu'on voulut. Tant de secousses,
tant d'interets divers l'avaient agite, qu'il ne savait plus a quoi se
resoudre, et, voyant le malheur de tous les cotes, il n'osait ni lutter ni
choisir. Gerard lui-meme, ordinairement ferme, cherchait vainement quelque
moyen de salut, et se voyait oblige de dire qu'il fallait laisser faire le
destin.
Deux evenements inattendus changerent tout a coup les choses. Frederic
etait seul, un soir, dans sa chambre; il vit entrer Bernerette. Elle etait
pale, les cheveux en desordre; une fievre ardente faisait briller ses
yeux d'un eclat effrayant; contre l'ordinaire, sa parole etait breve,
imperieuse. Elle venait, disait-elle, sommer Frederic de s'expliquer.
--Vous voulez me tuer? lui demanda-t-elle. M'aimez-vous ou ne m'aimez-vous
pas? Etes-vous un enfant? Avez-vous besoin des autres pour agir? Etes-vous
fou de consulter votre pere pour savoir s'il faut garder votre maitresse?
Qu'est-ce que ces gens-la desirent? Nous separer. Si vous le voulez comme
eux, vous n'avez que faire de leur avis, et si
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