ete profondement touchee de
l'action de Maxence.
Trouvait-elle donc enfin, sur son chemin, le compagnon que souvent
elle avait reve, aux heures desesperees de solitude et d'abandon?
Au bout d'un moment, elle releva la tete et, plongeant dans les yeux
de Maxence un regard qui le fit tressaillir comme le choc d'une
batterie electrique:
--Sans doute, reprit-elle, d'un ton d'insouciance un peu force, vous
vous dites que vous avez une etrange voisine... Eh bien! comme entre
voisins il est bon de se connaitre, avant de me juger, ecoutez-moi...
La recommandation etait inutile. C'est de toute la puissance de son
attention que Maxence ecoutait.
--C'est dans un village des environs de Paris, a Louveciennes,
commenca la jeune fille, que j'ai ete elevee. Ma mere m'y avait mise
en nourrice chez d'honnetes maraichers, pauvres et charges de famille.
Au bout de deux mois, n'entendant pas parler de ma mere, ils lui
ecrivirent. Elle ne repondit pas.
Ils se rendirent alors a Paris, a l'adresse qu'elle leur avait donnee.
Elle venait de demenager et on ne savait ce qu'elle etait devenue.
C'etait fini, ils n'avaient plus a compter sur un centime pour les
soins qu'ils me donnaient. Ils me garderent, cependant, se disant
qu'un enfant de plus ne les appauvrirait pas beaucoup.
Je ne sais donc rien de mes parents que par ces braves maraichers, et
comme j'etais tout enfant encore, lorsque j'ai eu le malheur de les
perdre, tout ce qu'ils m'en avaient appris est reste tres-vague dans
ma memoire.
Je me rappelle cependant que, d'apres eux, ma mere etait une
tres-jeune ouvriere, d'une rare beaute, et que vraisemblablement elle
n'etait pas la femme de mon pere.
Il me souvient encore que peu de temps avant sa mort, ma bonne
maraichere ayant eu occasion de passer une journee a Paris, elle
rentra furieuse, disant qu'elle venait de rencontrer ma mere, en
toilette magnifique, etalee dans une superbe voiture a deux chevaux,
que c'etait invraisemblable, et que cependant c'etait vrai, qu'elle en
etait sure, qu'elle l'avait tres-bien reconnue, et qu'il fallait que
ma mere n'eut pas plus de coeur qu'un rocher pour oublier sa fille,
alors qu'elle avait fait fortune.
Si on m'a dit autrefois le nom de ma mere ou de mon pere, si je l'ai
su, je ne me le rappelle plus.
Moi-meme, je n'avais pas de nom. Mes parents adoptifs m'appelaient la
Parisienne.
Je n'en etais pas moins heureuse chez ces honnetes gens, et traitee
absolument comme le
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