re a lui
etre accessible avant qu'il ait fait preuve de maturite;--c'est-a-dire
que je ne connais intimement que des vieux comme moi.
Resume tout cela a sa famille et a lui comme tu l'entendras. Pour etre
utile aux gens, il faut les connaitre et savoir leur presenter les
choses; autrement, on les blesse sans les eclairer.
A toi de coeur, mon vieux ami.
GEORGE SAND.
DCXLII
A GUSTAVE FLAUBERT, A PARIS
Nohant, 6 aout 1867.
Quand je vois le mal que mon vieux se donne pour faire un roman, ca me
decourage de ma facilite, et je me dis que je fais de la litterature
_savetee_. J'ai fini _Cadio_; il est depuis longtemps dans les pattes de
Buloz. Je fais une autre machine [1] mais je n'y vois pas encore bien
clair; que faire sans soleil et sans chaleur? C'est a present que je
devrais etre a Paris, revoir l'Exposition a mon aise, et promener ta
mere avec toi; mais il faut bien travailler, puisque je n'ai plus que ca
pour vivre. Et puis les enfants! cette Aurore est une merveille. Il faut
bien la voir, je ne la verrai peut-etre pas longtemps, je ne me crois
pas destinee a faire de bien vieux os: faut se depecher d'aimer!
Oui, tu as raison, c'est la ce qui me soutient. Cette crise d'hypocrisie
amasse une rude replique et on ne perd rien pour attendre. Au contraire,
on gagne. Tu verras ca, toi qui es un vieux encore tout jeune. Tu as
l'age de mon fils. Vous rirez ensemble quand vous verrez degringoler ce
tas d'ordures.
Il ne faut pas etre Normand, il faut venir nous voir plusieurs jours, tu
feras des heureux; et, moi, ca me remettra du sang dans les veines et de
la joie dans le coeur.
Aime toujours ton vieux troubadour et parle-lui de Paris; quelques mots
quand tu as le temps.
Fais un canevas pour Nohant a quatre ou cinq personnages, nous te le
jouerons.
On t'embrasse et on t'appelle.
[1] _Mademoiselle Merquem_.
DCXLIII
A M. RAOUL LAFAGETTE, A PARIS
Nohant, 10 aout 1867.
Monsieur,
Puisque, a tant d'eclat et de vigueur dans l'esprit, vous joignez tant
de douceur et de modestie, j'irai jusqu'au bout de ma franchise. Je vous
dirai: "Attendez encore pour vous faire connaitre; vous etes si jeune!"
Et, pourtant, ceci est mon sentiment personnel, et il me vient des
scrupules en lisant les deux pieces que vous m'envoyez. Il me semble
qu'elles ont une reelle valeur. Tenez, allez voir un vrai maitre,
Theophile Gautier; allez
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