par l'escalier secret. Toutes ces angoisses qu'il
eprouvait depuis un quart d'heure, il les avait donc eprouvees
inutilement. Ce qu'il croyait fini ou pres de finir etait donc a
recommencer.
D'Alencon ouvrit la porte de sa chambre, puis, tout en la tenant
fermee, il alla ecouter a celle du corridor. Cette fois, il n'y
avait pas a se tromper, c'etait bien Henri. D'Alencon reconnut son
pas et jusqu'au bruit particulier de la molette de ses eperons.
La porte de l'appartement de Henri s'ouvrit et se referma.
D'Alencon rentra chez lui et tomba dans un fauteuil.
-- Bon! se dit-il, voici ce qui se passe a cette heure: il a
traverse l'antichambre, la premiere piece, puis il est parvenu
jusqu'a la chambre a coucher; arrive la, il aura cherche des yeux
son epee, puis sa bourse, puis son poignard, puis enfin il aura
trouve le livre tout ouvert sur son dressoir.
" -- Quel est ce livre? se sera-t-il demande; qui m'a apporte ce
livre?
" Puis il se sera rapproche, aura vu cette gravure representant un
cavalier rappelant son faucon, puis il aura voulu lire, puis il
aura essaye de tourner les feuilles.
Une sueur froide passa sur le front de Francois.
-- Va-t-il appeler? dit-il. Est-ce un poison d'un effet soudain?
Non, non, sans doute, puisque ma mere a dit qu'il devait mourir
lentement de consomption.
Cette pensee le rassura un peu. Dix minutes se passerent ainsi,
siecle d'agonie use seconde par seconde, et chacune de ces
secondes fournissant tout ce que l'imagination invente de terreurs
insensees, un monde de visions. D'Alencon n'y put tenir davantage,
il se leva, traversa son antichambre, qui commencait a se remplir
de gentilshommes.
-- Salut, messieurs, dit-il, je descends chez le roi.
Et pour tromper sa devorante inquietude, pour preparer un alibi
peut-etre, d'Alencon descendit effectivement chez son frere.
Pourquoi descendait-il? Il l'ignorait... Qu'avait-il a lui
dire?... Rien! Ce n'etait point Charles qu'il cherchait, c'etait
Henri qu'il fuyait.
Il prit le petit escalier tournant et trouva la porte du roi
entrouverte.
Les gardes laisserent entrer le duc sans mettre aucun empechement
a son passage: les jours de chasse il n'y avait ni etiquette ni
consigne.
Francois traversa successivement l'antichambre, le salon et la
chambre a coucher sans rencontrer personne; enfin il songeait que
Charles etait sans doute dans son cabinet des Armes, et poussa la
porte qui donnait de la chambre a coucher dans
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