aix a quelque prix que ce fut.
Le roi d'Angleterre lui repondit qu'il lui demandait une chose
impossible, lui reprocha son inconstance, et lui fit avec chagrin le
detail des grosses depenses que l'Angleterre avait faites pour le
soutenir, sans qu'il en eut su profiter. Il lui offrit neanmoins encore
quelque secours de troupes s'il voulait s'en contenter. Le comte, de son
cote, se plaignit qu'on l'abandonnait apres qu'il s'etait sacrifie pour
le service de la couronne d'Angleterre, qu'il etait entierement ruine,
et que le petit secours qu'on lui offrait etait moins pour le defendre,
que pour l'engager a se perdre sans ressources; et l'on se separa fort
mecontent de part et d'autre. Apres ce que nous avons rapporte de la
derniere expedition du roi d'Angleterre en Bretagne, il serait bien
difficile de decider lequel de lui ou du comte s'etait conduit avec le
plus d'imprudence.
Le comte de Bretagne n'eut pas plutot repasse la mer, qu'il vint se
jeter aux pieds du roi pour lui demander misericorde, en confessant
qu'il etait un rebelle, un traitre, qu'il lui abandonnait tous ses etats
et sa propre personne pour le punir comme il le jugerait a propos.
Le roi, touche de la posture humiliante ou il voyait le comte, fit
ceder ses justes ressentimens a sa compassion; et, apres lui avoir fait
quelques reproches sur sa conduite passee, il lui dit que, quoiqu'il
meritat la mort pour sa felonie, et pour les maux infinis qu'il avait
causes a l'etat, il lui donnait la vie; qu'il accordait ce pardon a
sa naissance, qu'il lui rendait ses etats, et qu'il consentait qu'ils
passassent a son fils, qui n'etait pas coupable des crimes de son pere.
Le comte, penetre de la bonte du roi, lui promit de le servir envers
tous, et contre tous. Il lui remit ses forteresses de Saint-Aubin, de
Chanteauceaux et de Mareuil pour trois ans, et s'obligea de plus a
servir a ses frais pendant cinq ans en Palestine, et a retablir la
noblesse de Bretagne dans tous ses privileges.
Le comte, tres-content d'en etre quitte a si bon marche, retourna en
Bretagne, d'ou il envoya declarer au roi d'Angleterre qu'il ne se
reconnaissait plus pour son vassal. Henri ne fut point surpris de cette
declaration; mais sur-le-champ il confisqua le comte de Richemont et les
autres terres que le comte possedait en Angleterre. Le comte, pour s'en
venger, fit equiper dans ses ports quelques vaisseaux avec lesquels il
fit courir sur les Anglais, troubla partout leur commerce, et
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