blige que jamais de
menager le roi.
Il pretendit que la cession qu'il avait faite des comtes de Blois, de
Chartres, de Sancerre et des autres fiefs dont il avait traite avec le
roi pour les droits de la reine de Chypre, n'etait point une vente, mais
seulement un engagement de ces fiefs avec pouvoir de les retirer en
rendant la somme d'argent que le roi avait payee pour lui: il entreprit
donc de l'obliger a les lui rendre. Outre son humeur inquiete, il fut
encore anime par le comte de la Marche, et encore plus par la comtesse
sa femme, qui, apres avoir rabaisse sa qualite de reine d'Angleterre
en epousant un simple vassal du roi de France, conservait neanmoins
toujours sa fierte a ne pouvoir plier sous le joug de la dependance.
Il y avait un an que ces intrigues se tramaient. Des que le roi en fut
averti, il en prevint l'effet. Il fit assembler promptement les milices
des communes, et celles de ses vassaux. Ses ordres ayant ete executes,
son armee se trouva prete a marcher avant que le roi de Navarre eut pu
mettre en defense ses places les plus voisines de Paris. Mais Thibaud,
qui savait bien qu'avec ses seules forces il ne pourrait resister a
la puissance du roi, avait pris l'annee precedente des mesures pour
suspendre l'orage. Comme il s'etait croise pour faire le voyage de la
Terre-Sainte, il crut pouvoir se prevaloir des privileges accordes aux
croises par les papes, dont l'un etait de ne pouvoir etre attaques par
leurs ennemis. Il fit entendre au pape Gregoire IX que le roi voulait
lui faire la guerre, et le mettrait dans l'impuissance d'accomplir
son voeu. Le pape, qui avait cette expedition fort a coeur, ecrivit
sur-le-champ au roi, moins pour le prier, que pour lui defendre, sous
peine des censures ecclesiastiques, de ne rien entreprendre contre un
prince croise pour le soutien de la religion.
Le roi, plus eclaire sur cet article que plusieurs de ses predecesseurs,
et qui connaissait parfaitement ce qu'il pouvait et ce qu'il devait
faire en conscience en cette matiere, n'eut pas beaucoup d'egard aux
lettres du pape, mal informe des intrigues et des mauvais desseins du
roi de Navarre: il assembla son armee au bois de Vincennes, dans la
ferme resolution de fondre incessamment sur la Brie et sur la Champagne.
Le roi de Navarre, fort embarrasse, car le roi avait resolu de le punir,
prit le parti de la soumission, qui lui avait deja reussi. Il envoya
promptement un homme de confiance, qui vint temoigner au roi
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