mon enfance et ma jeunesse, j'ai vu moi aussi de beaux jours. Si
vous saviez comme j'etais heureux lorsque je revenais chaque annee dans
ma famille pour y passer mes vacances. Nous etions plusieurs compagnons
de college de la meme paroisse. Oh! que nous nous en promettions des
parties de peche et de chasse et comme alors nous avions le coeur leger,
l'ame pure et tranquille. Il me semble encore voir ma vieille mere, mon
pere et mes soeurs accourir au-devant de moi, me presser tour a tour
dans leurs bras et m'arroser la figure de leurs larmes lorsque je venais
deposer A leurs pieds les prix nombreux que j'avais obtenu pour mes
succes classiques. Puis le bon vieux cure que nous ne manquions jamais
d'aller voir, il nous avait baptises, fait faire notre premiere
communion; de plus, il nous avait inities aux premieres notions de
la langue latine. Il nous considerait donc comme ses enfants et nous
recevait avec le plus grand plaisirs et la plus touchante affection. Son
presbytere et sa table etaient toujours a notre disposition. Il etait
aussi fier de nos succes que si nous lui eussions appartenus.
Nos jours de vacance se passaient en des parties de peche et de chasse;
mes bons parents refusant que je prisse part a leurs travaux crainte que
je ne me fatiguasse. Le soir amenait les joyeuses veillees. Nous nous
reunissions tantot dans une maison, tantot dans l'autre. Au son du
violon nous dansions quelques rondes au milieu des rires de la plus
folle gaite; puis, dix heures sonnant, la voix de l'aieule se faisait
entendre, nous tombions a genoux et recitions en commun la priere du
soir, et noua noua separions en nous promettant bien de recommencer le
lendemain.
La voix du moribond a ces souvenirs se remplit d'emotion puis il ajouta
comme se parlant a lui-meme. Chers souvenirs des beaux jours du ma
jeunesse, combien de fois avec celui des larmes de plaisir de mes bons
parents n'etes vous pas venus tomber sur mon coeur desespere comme la
rosee bienfaisante sur la fleur dessechee? Ah! pourquoi ai-je a jamais
abandonne le sentier beni de la vertu avec ses joies si pures et si
naives pour ceder a mon execrable passion? Pourquoi ai-je perdu le
touchant exemple de cette vie de calme, d'amour et de religion que
me donnaient ma famille et tous ceux qui m'entouraient!... A ces
reminiscences de son passe si fortune, Helika ferma les yeux comme pour
savourer une derniere fois les delices des beaux jours de son enfance.
Il parut se recueil
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