un coeur devoue.
Ce qui vous surprendra peut-etre encore plus, c'est que j'ai toujours
ete a l'un et a l'autre le plus sincere et intime ami, partageant avec
Bois Hebert toutes les peripeties de sa vie aventureuse, et reprenant
dans les temps de calme mes fonctions de precepteur aupres de ses
enfants quand il eut epouse Adala.
Pardonnez, ajouta monsieur d'Olbigny, au vieillard, les pleurs qui
coulent de ses yeux, et permettez-moi de tirer le rideau sur ces
souvenirs qui m'emeuvent encore malgre moi. D'ailleurs, si quelqu'un
d'entre nous en ressent le courage apres la lecture de ces pages, il
pourra voir l'histoire de leur vie dans le "Braillard de la Magdeleine".
Je reprends la lecture du manuscrit, c'etait, si vous vous en rappelez
au sortir de l'eglise et apres que Helika eut recu les embrassements de
sa mere, pour prendre les grands bois.
Ou allais-je? ou ai-je ete? Qu'ai-je fait? Je n'en sais rien. J'etais
habitue au college aux plus violents exercices. En gymnase j'etais de
premiere habilete et l'on me considerait comme un tres grand marcheur;
ma force et ma vigueur etaient reputees extraordinaires.
Lorsque la connaissance me revint, j'eprouvai une grande lassitude dans
les jambes, je marchais encore mais d'un mouvement automatique.
Je devais etre bien loin, mon pauvre chien ne me suivait plus que
difficilement, et le soleil etait monte sur les onze heures du matin.
Mon front etait brulant et je frissonnais parce qu'une fievre ardente me
devorait. J'etais aupres d'un petit ruisseau ou coulait une eau fraiche
et limpide; j'y trompai mon mouchoir et m'en enveloppai la tete; cette
application me fit du bien. Je tirai ensuite de mon havre-sac quelques
aliments, mais je ne pus pas meme les approcher de ma bouche; je les
jetai a mon chien qui les devora. Quelques instants apres, je dormais
profondement, Je n'avais pas ferme l'oeil depuis longtemps et avais
toujours marche depuis le matin de la veille. Grace a ma forte
constitution, lorsque je m'eveillai le lendemain, la fievre avait
disparu completement et mes idees etaient parfaitement lucides.
Le soleil s'etait leve dans tout son eclat; un nid de fauvettes place
sur une branche aupres de moi, etait balance par la brise du matin. Le
pere secouant ses ailes toutes humides des gouttes de rosee, adressait
au Createur ses notes d'amour et de reconnaissance, pendant que la mere
distribuait a la famiile la becquee du matin. Un instant, une seconde
peut-etre, je le
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