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moi. Requis comme secretaire par l'officier payeur du detachement, le lieutenant Christophe, je dus a cet honneur de faire, sans plus tarder, ample connaissance avec la ville. Sac au dos, fusil sur l'epaule, il fallut suivre toute la ligne des boulevards neufs qui enveloppent la cite, frissonner a la vue du sombre chateau d'ardoises a grosses tours edifie par saint Louis, saluer en passant la statue du paisible roi Rene, et tacher de se retrouver dans le dedale des rues du quartier central, qui montent, descendent, remontent, s'enchevetrent. C'est tres pittoresque, mais bien fatigant. Vers deux heures, je recouvrai ma liberte, et, a mon tour, je me mis a la recherche de mon habitant, un sculpteur, je crois, demeurant a la montee des Forges, sur l'autre rive de la Maine. Une jeune femme me recut poliment, et je me rejouissais a l'idee de m'asseoir, un jour ou deux, a un honnete foyer familial qui, me rappellerait celui ou je manquais; mais je fus tres courtoisement adresse a une banale hotellerie du voisinage. Mon lit n'en fut pas moins excellent. La douce chose, au bout d'un long voyage et apres quinze jours de campement, meme sur des remparts ouates de gazon! Quel heroisme, le lendemain, de sauter hors des draps, avant le jour, sans avoir dormi son content! Voila de tout petits sacrifices dont la vie militaire est semee et qui la rendent aussi meritoire que les actions d'eclat dans l'apotheose d'un jour de bataille! III A sept heures, j'etais donc a plus d'un kilometre de mon gite, tout la-bas, devant l'Hotel de Ville, sur le Champ de Mars que bordent les jardins publics, et je n'y etais pas seul. Trois mille six cents de mes pareils grouillaient autour d'une cinquantaine d'officiers, l'effectif de dix-huit compagnies venues de tous les coins de la France, pour se fondre en un seul corps. Chaque commandant d'unite ralliait ses hommes de son mieux, ce qui, dans cette foule uniforme, n'etait pas tres aise. Le notre, le lieutenant Martial Eynard, etait des plus actifs et des plus energiques. De taille moyenne, il avait la demarche souple, le pas elastique, les epaules larges, la poitrine bombee, le buste en avant d'un bon gymnaste, avec la tete blonde et fine, deja un peu murie, d'un elegant Saint-Cyrien. L'oeil vif, le regard direct, temoignant d'une noble ardeur; la voix chaude et vibrante, aussi prompte a l'eloge qu'au blame. Son sang genereux, que sa blessure encore ouverte semblait rafraichir, et n
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