ta mere, vu que
je lui avais promis ca. Alors... tu comprends?
--Oui, pere.
--Donc, j'ai pris une petite a Rouen, rue de l'Eperlan, 18, au
troisieme, la seconde porte--je te dis tout ca, n'oublie pas,--mais une
petite qui a ete gentille tout plein pour moi, aimante, devouee, une
vraie femme, quoi? Tu saisis, mon gars?
--Oui, pere.
--Alors, si je m'en vas, je lui dois quelque chose, mais quelque chose
de serieux qui la mettra a l'abri. Tu comprends?
--Oui, pere.
--Je te dis que c'est une brave fille, mais la, une brave, et que, sans
toi, et sans le souvenir de ta mere, et puis sans la maison ou nous
avons vecu tous trois, je l'aurais amenee ici, et puis epousee, pour
sur... ecoute... ecoute... mon gars... j'aurais pu faire un testament...
je n'en ai point fait! Je n'ai pas voulu... car il ne faut point ecrire
les choses... ces choses-la... ca nuit trop aux legitimes... et puis ca
embrouille tout... ca ruine tout le monde! Vois-tu, le papier timbre,
n'en faut pas, n'en fais jamais usage. Si je suis riche, c'est que je ne
m'en suis point servi de ma vie. Tu comprends, mon fils!
--Oui, pere.
--Ecoute encore... Ecoute bien... Donc, je n'ai pas fait de testament...
je n'ai pas voulu..., et puis je te connais, tu as bon coeur, tu n'es
pas ladre, pas regardant, quoi. Je me suis dit que, sur ma fin, je
te conterais les choses et que je te prierais de ne pas oublier la
petite:--Caroline Donet, rue de l'Eperlan, 18, au troisieme, la seconde
porte, n'oublie pas.--Et puis, ecoute encore. Vas-y tout de suite quand
je serai parti--et puis arrange-toi pour qu'elle ne se plaigne pas de ma
memoire.--Tu as de quoi.--Tu le peux,--je te laisse assez... Ecoute...
En semaine on ne la trouve pas. Elle travaille chez Mme Moreau, rue
Beauvoisine. Vas-y le jeudi. Ce jour-la elle m'attend. C'est mon jour,
depuis six ans. Pauvre p'tite, va-t-elle pleurer!... Je te dis tout ca,
parce que je te connais bien, mon fils. Ces choses-la on ne les conte
pas au public, ni au notaire, ni au cure. Ca se fait, tout le monde le
sait, mais ca ne se dit pas, sauf necessite. Alors personne d'etranger
dans le secret, personne que la famille, parce que la famille, c'est
tous en un seul. Tu comprends?
--Oui, pere.
--Tu promets?
--Oui, pere.
--Tu jures?
--Oui, pere
--Je t'en prie, je t'en supplie, fils, n'oublie pas. J'y tiens.
--Non, pere.
--Tu iras toi-meme. Je veux que tu t'assures de tout.
--Oui, pere.
--Et puis, tu ver
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