admiration particuliere pour la
moderation des Francais et leur douceur. Dans leurs expeditions, ils
evitaient de verser le sang, et au milieu de leurs succes, ils avaient
horreur de ces massacres outres et odieux qui viennent parfois de
l'enivrement et de l'entrainement de la victoire. Ce sont ces sentiments
qui ont gagne le coeur de ces barbares, et en ont fait les allies
devoues de la France.
M. de Troyes, voyant l'expedition terminee, se disposa a revenir a
Montreal, comme on le lui avait enjoint a son depart. Il remit la garde
des forts au jeune de Maricourt, chargea d'Iberville de courir la mer
contre les vaisseaux anglais; enfin, il confia au digne Pere Silvy le
soin spirituel de la garnison. D'Iberville utilisa ses fonctions avec
les deux batiments qu'il avait. Il s'empara d'un grand vaisseau anglais
qu'il chargea de toutes les pelleteries des forts qu'il avait pris, puis
il decida de revenir a Quebec pour aller prendre quelques vaisseaux qui
lui seraient indispensables pour attaquer les convois anglais l'annee
suivante.
Il parait donc qu'il revint aux derniers jours d'automne 1686, avec
Sainte-Helene, et il fut recu a Montreal comme un triomphateur. Toute la
ville savait quelle part il avait eue aux succes de l'expedition. Les
citoyens voyaient avec bonheur leur compatriote couvert de gloire.
D'Iberville rentra dans Montreal tambour battant et enseignes deployees.
Les citoyens acclamaient le vainqueur; et la mere, retrouvant ses
enfants apres des jours d'inquietude et encore desolee de son veuvage,
combien elle etait heureuse de les revoir sains et saufs!
Nous ne pouvons savoir, d'apres les documents, la date precise et les
circonstances de la mort de Charles Le Moyne, que l'on place en 1685.
Nous savons seulement que s'il avait vecu en 1686, il n'aurait eu que 60
ans et aurait encore pu etre plein de force et de resolution.
Mais telle etait alors la situation glorieuse de cette nombreuse famille
qui comptait dix enfants. L'aine, Le Moyne de Longueuil, etait honore
de la confiance des autorites superieures, et il avait l'affection des
nations sauvages, qui l'avaient choisi comme leur representant pres du
gouvernement. Sainte-Helene, de Maricourt et de Bienville etaient des
militaires consommes. A l'egard de Maricourt, nous avons un temoignage
digne de consideration dans une lettre de Mgr de Laval du 12 janvier
1684.
D'Iberville s'etait revele comme commandant capable, et sur mer comme
manoeuvrier des
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