on et de guerre. En
temps calme, la societe aime mieux, disait-il, laisser echapper le
coupable que frapper l'innocent, parce que le coupable est peu dangereux,
mais a mesure qu'il le devient davantage, elle tend davantage aussi a le
saisir; et lorsqu'il devient si dangereux qu'il pourrait la faire perir,
ou du moins quand elle le croit ainsi, elle frappe tout ce qui excite ses
soupcons, et prefere alors atteindre un innocent que laisser echapper un
coupable. Telle est la dictature, c'est-a-dire l'action violente dans
les societes menacees; elle est rapide, arbitraire, fautive, mais
irresistible.
Ainsi la concentration des pouvoirs dans la convention, l'installation du
tribunal revolutionnaire, le commencement de l'inquisition contre les
suspects, un redoublement de haine contre les deputes qui resisteraient a
ces moyens extraordinaires, furent le resultat de la bataille de Nerwinde,
de la retraite de la Belgique, des menaces de Dumouriez, et des mouvements
de la Vendee.
L'humeur de Dumouriez s'etait accrue avec ses revers. Il venait
d'apprendre que l'armee de Hollande se retirait en desordre, abandonnait
Anvers et l'Escaut, en laissant dans Breda et Gertruydenberg les deux
garnisons francaises; que d'Harville n'avait pu garder le chateau de
Namur, et se repliait sur Givet et Maubeuge; que Neuilly enfin, loin de
pouvoir se maintenir a Mons, s'etait vu oblige de se retirer sur Conde et
Valenciennes, parce que sa division, au lieu de prendre position sur les
hauteurs de Nimy, avait pille les magasins et pris la fuite. Ainsi, par
suite des desordres de cette armee, il voyait s'evanouir le projet de
former en Belgique un demi-cercle de places fortes, qui aurait passe de
Namur en Flandre et en Hollande, et au centre duquel il se serait place
pour agir avec plus d'avantage. Il n'avait bientot plus rien a offrir en
echange aux Imperiaux, et il tombait sous leur dependance en
s'affaiblissant. Sa colere augmentait en approchant de la France, en
voyant les desordres de plus pres, et en entendant les cris qui
s'elevaient contre lui. Deja il ne se cachait plus; et ses paroles,
proferees en presence de son etat-major, et repetees dans l'armee,
annoncaient les projets qui fermentaient dans sa tete. La soeur du duc
d'Orleans et Mme de Sillery, fuyant les proscriptions qui les menacaient,
s'etaient rendues en Belgique pour chercher une protection aupres de leurs
freres. Elles etaient a Ath, et ce fut un nouvel aliment donne aux
s
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