t seul.
Sur les six heures du soir, il tomba a terre en disant que le berger etait
sur lui et l'ecrasait; et, en presence de tous les assistants, qui ne
voyaient rien, il tira de sa poche un couteau pointu, dont il donna cinq
ou six coups dans le visage du malheureux par qui il se croyait assailli.
Enfin, au bout de huit semaines de souffrances, il alla a Saint-Maur, avec
confiance qu'il guerirait ce jour-la. Il se trouva mal trois fois; mais
apres la messe, il lui sembla qu'il voyait saint Maur debout, en habit de
benedictin, et le berger a sa gauche, le visage ensanglante de cinq coups
de couteau, sa houlette a la main et ses deux chiens a ses cotes. Il
s'ecria qu'il etait gueri, et il le fut en effet des ce moment.
Quelques jours apres, chassant dans les environs de Noisy, il vit
effectivement son berger dans une vigne. Cet aspect lui fit horreur; il
donna au sorcier un coup de crosse de fusil sur la tete: Ah! monsieur, vous
me tuez! s'ecria le berger en fuyant; mais le lendemain il vint trouver M.
de la Richardiere, se jeta a ses genoux, lui avoua qu'il s'appelait Danis,
qu'il etait sorcier depuis vingt ans, qu'il lui avait en effet donne le
sort dont il avait ete afflige, que ce sort devait durer un an; qu'il n'en
avait ete gueri au bout de huit semaines qu'a la faveur des neuvaines qu'on
avait faites; que le malefice etait retombe sur lui Danis, et qu'il se
recommandait a sa misericorde. Puis, comme les archers le poursuivaient, le
berger tua ses chiens, jeta sa houlette, changea d'habits, se refugia a
Torcy, fit penitence et mourut au bout de quelques jours...
Le pere Lebrun, qui rapporte[1] longuement cette aventure, pense qu'il peut
bien y avoir la sortilege. Il se peut aussi, plus vraisemblablement, qu'il
n'y eut qu'hallucination.
[Note 1: _Histoire des pratiques superstitieuses_, t. I, p. 281.]
III.--HOMMES CHANGES EN BETES. LYCANTHROPES. LOUPS-GAROUS.
Suivant Donat de Hautemer[1], cite par Goulart[2]. "il y a des lycanthropes
esquels l'humeur melancholique domine tellement qu'ils pensent
veritablement estre transmuez en loups. Ceste maladie, comme tesmoigne
Aetius au sixiesme livre, chapitre XI et Paulus au troisieme livre,
chapitre XVI, et autres modernes, est une espece de melancholie, mais
estrangement noire et vehemente. Car ceux qui en sont atteints sortent de
leurs maisons au mois de fevrier, contrefont les loups presques en toute
chose, et toute nuict ne font que courir par les c
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