porter sa bourse, afin qu'il put la voir encore
avant de mourir. Quand il la tint, il la serra tendrement, et ordonna qu'on
l'enterrat avec lui, parce qu'il trouvait l'idee de s'en separer
dechirante. On ne lui promit rien precisement; et il mourut en contemplant
son or. Alors on lui arracha sa bourse des mains, ce qui ne se fit pas sans
peine. Mais quelle fut la surprise de la famille assemblee, lorsqu'en
ouvrant le sac on y trouva, non plus des pieces d'or, mais deux
crapauds!... Le diable etait venu, et en emportant l'ame de l'usurier, il
avait emporte son or, comme deux choses inseparables et qui n'en faisaient
qu'une[1].
[Note 1: Caesarii, _Hist. de morientibus_, cap. XXXIX _Mirac._ lib.
II.]
Voici autre chose: Un homme qui n'avait que vingt sous pour toute fortune
se mit a vendre du vin aux passants. Pour gagner davantage, il mettait
autant d'eau que de vin dans ce qu'il vendait. Au bout d'un certain temps,
il amassa, par cette voie injuste, la somme de cent livres. Ayant serre cet
argent dans un sac de cuir, il alla avec un de ses amis faire provision de
vin pour continuer son trafic; mais, comme il etait pres d'une riviere, il
tira du sac de cuir une piece de vingt sous pour une petite emplette; il
tenait le sac dans la main gauche et la piece dans la droite; incontinent
un oiseau de proie fondit sur lui et lui enleva son sac, qu'il laissa
tomber dans la riviere. Le pauvre homme, dont toute la fortune se trouvait
ainsi perdue, dit a son compagnon: Dieu est equitable; je n'avais qu'une
piece de vingt sous quand j'ai commence a voler; il m'a laisse mon bien, et
m'a ote ce que j'avais acquis injustement[1].
[Note 1: Saint Gregoire de Tours, livre des _Miracles_.]
Un etranger bien vetu, passant au mois de septembre 1606 dans un village de
la Franche-Comte, acheta une jument d'un paysan du lieu pour la somme de
dix-huit ducatons. Comme il n'en avait que douze dans sa bourse, il laissa
une chaine d'or en gage du reste, qu'il promit de payer a son retour. Le
vendeur serra le tout dans du papier, et le lendemain trouva la chaine
disparue, et douze plaques de plomb au lieu des ducatons[1].
[Note 1: Boguet, _Discours des sorciers_.]
"M. Remy, dans sa _Demonolatrie_[1], parle de plusieurs personnes qu'il a
ouies en jugement en sa qualite de lieutenant general de Lorraine, dans le
temps ou ce pays fourmilloit de sorciers et de sorcieres: ceux d'entre eux
qui croyoient avoir recu de l'argent du dem
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