nse que nous serons dans
Paris.
-- Il parait que c'est tres facile."
Au moment de sortir elle revint pres de sa mere et se pencha vers
elle:
"Il y a plusieurs voitures qui ont des baches, on lit dessus:
"Usines de Maraucourt", et au-dessous le nom: "Vulfran
Paindavoine"; sur les toiles qui couvrent les pieces de vin
alignees le long du quai on lit aussi la meme inscription.
-- Cela n'a rien d'etonnant.
-- Ce qui est etonnant c'est de voir ces noms si souvent repetes."
II
Quand Perrine revint prendre sa place aupres de son ane, il
s'etait enfonce le nez dans la voiture de foin, et il mangeait
tranquillement comme s'il avait ete devant un ratelier.
"Vous le laissez manger? s'ecria-t-elle.
-- J'vous crois.
-- Et si le charretier se fache?
-- Faudrait pas avec moi."
Il se mit en posture d'invectiver un adversaire, les poings sur
les hanches, la tete renversee.
"Ohe, croquant!"
Mais son concours ne fut pas necessaire pour defendre Palikare;
c'etait au tour de la voiture de foin d'etre sondee a coups de
lance par les employes de l'octroi, et elle allait passer la
barriere.
"Maintenant ca va etre a vous; je vous quitte. Au revoir,
mam'zelle; si vous voulez jamais avoir de mes nouvelles, demandez
Gras Double, tout le monde vous repondra."
Les employes qui gardent les barrieres de Paris sont habitues a
voir bien des choses bizarres, cependant celui qui monta dans la
voiture photographique eut un mouvement de surprise en trouvant
cette jeune femme couchee; et surtout en jetant les yeux ca et la
d'un rapide coup d'oeil qui ne rencontrait partout que la misere.
"Vous n'avez rien a declarer? demanda-t-il en continuant son
examen.
-- Rien.
-- Pas de vin, pas de provisions?
-- Rien."
Ce mot deux fois repete etait d'une exactitude rigoureuse: en
dehors du matelas, de deux chaises de paille, d'une petite table,
d'un fourneau en terre, d'un appareil et de quelques ustensiles
photographiques, il n'y avait rien dans cette voiture: ni malles,
ni paniers, ni vetements.
"C'est bien, vous pouvez entrer."
La barriere passee, Perrine tourna tout de suite a droite, comme
Gras Double lui avait recommande, conduisant Palikare par la
bride. Le boulevard qu'elle suivait longeait le talus des
fortifications, et dans l'herbe roussie, poussiereuse, usee par
plaques, des gens etaient couches qui dormaient sur le dos ou sur
le ventre, selon qu'ils etaient plus ou moins aguerris contre le
soleil
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