ls reprirent leur besogne avec une activite
que le repos avait renouvelee.
Cependant, si furieux que fut leur travail, elle se disait qu'il
ne finirait jamais; d'un instant a l'autre on allait venir les
arreter, et surement elle avec eux.
Si elle pouvait se sauver! Elle chercha le moyen de sortir de la
cabane, ce qui, a vrai dire, n'etait pas difficile; mais ou irait-
elle sans etre exposee a faire du bruit et a reveler ainsi sa
presence qui, si elle ne bougeait pas, devait rester ignoree?
Alors elle se recoucha et feignit de dormir, car puisqu'il lui
etait impossible de sortir sans s'exposer a etre arretee au
premier pas, le mieux encore etait qu'elle parut n'avoir rien vu,
si les voleurs entraient dans la cabane.
Pendant un certain temps encore ils continuerent leur recolte,
puis, apres un coup de sifflet qu'ils lancerent, un bruit de roues
se fit entendre sur la route et bientot leur voiture s'arreta au
bout du champ; en quelques minutes elle fut chargee et au grand
trot elle s'eloigna du cote de Paris.
Si elle avait su l'heure, elle aurait pu se rendormir jusqu'a
l'aube, mais, n'ayant pas conscience du temps qu'elle avait passe
la, elle jugea qu'il etait prudent a elle de se remettre en route:
aux champs on est matineux; si au jour levant un paysan la voyait
sortir de cette piece depouillee, ou meme s'il l'apercevait aux
environs, il la soupconnerait d'etre de la compagnie des voleurs
et l'arreterait.
Elle se glissa donc hors de la cabane, et rampant comme les
voleurs pour sortir du champ, l'oreille aux ecoutes, l'oeil aux
aguets, elle arriva sans accident sur la grande route ou elle
reprit sa marche a pas presses; les etoiles qui criblaient le ciel
sans nuages avaient pali, et du cote de l'orient une faible lueur
eclairait les profondeurs de la nuit, annoncant l'approche du
jour.
VIII
Elle n'eut pas a marcher longtemps sans apercevoir devant elle une
masse noire confuse qui profilait d'un cote ses toits, ses
cheminees et son clocher sur la blancheur du ciel, tandis que de
l'autre tout restait noye dans l'ombre.
En arrivant aux premieres maisons, instinctivement elle etouffa le
bruit de ses pas, mais c'etait une precaution inutile; a
l'exception des chats, qui flanaient sur la route, tout dormait et
son passage n'eveilla que quelques chiens qui aboyaient derriere
les portes closes; il semblait que ce fut un village de morts.
Quand elle l'eut traverse, elle se calma et ralentit sa course,
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