illance; et le soir tous ses amis, le
menage Lormeau, Mme Lechaptois, ces demoiselles Rochefeuille, M. de
Houppeville et Bourais se presenterent pour la consoler.
La privation de sa fille lui fut d'abord tres-douloureuse. Mais trois
fois la semaine elle en recevait une lettre, les autres jours lui
ecrivait, se promenait dans son jardin, lisait un peu, et de cette facon
comblait le vide des heures.
Le matin, par habitude, Felicite entrait dans la chambre de Virginie, et
regardait les murailles. Elle s'ennuyait de n'avoir plus a peigner ses
cheveux, a lui lacer ses bottines, a la border dans son lit, et de ne
plus voir continuellement sa gentille figure, de ne plus la tenir par la
main quand elles sortaient ensemble. Dans son desoeuvrement, elle essaya
de faire de la dentelle. Ses doigts trop lourds cassaient les fils; elle
n'entendait a rien, avait perdu le sommeil, suivant son mot, etait "minee".
Pour "se dissiper", elle demanda la permission de recevoir son neveu
Victor.
Il arrivait le dimanche apres la messe, les joues roses, la poitrine
nue, et sentant l'odeur de la campagne qu'il avait traversee. Tout de
suite, elle dressait son couvert. Ils dejeunaient l'un en face de
l'autre; et, mangeant elle-meme le moins possible pour epargner la
depense, elle le bourrait tellement de nourriture qu'il finissait par
s'endormir. Au premier coup des vepres, elle le reveillait, brossait son
pantalon, nouait sa cravate, et se rendait a l'eglise, appuyee sur son
bras dans un orgueil maternel.
Ses parents le chargeaient toujours d'en tirer quelque chose, soit un
paquet de cassonade, du savon, de l'eau-de-vie, parfois meme de
l'argent. Il apportait ses nippes a raccommoder; et elle acceptait cette
besogne, heureuse d'une occasion qui le forcait a revenir.
Au mois d'aout, son pere l'emmena au cabotage.
C'etait l'epoque des vacances. L'arrivee des enfants la consola. Mais
Paul devenait capricieux, et Virginie n'avait plus l'age d'etre tutoyee,
ce qui mettait une gene, une barriere entre elles.
Victor alla successivement a Morlaix, a Dunkerque et a Brighton; au
retour de chaque voyage, il lui offrait un cadeau. La premiere fois, ce
fut une boite en coquilles; la seconde, une tasse a cafe; la troisieme,
un grand bonhomme en pain d'epices. Il embellissait, avait la taille
bien prise, un peu de moustache, de bons yeux francs, et un petit
chapeau de cuir, place en arriere comme un pilote. Il l'amusait en lui
racontant des his
|