un lache a
mes yeux, si, bien plus justement, je ne vous regardais comme un
fou.
-- Monsieur, s'ecria de Wardes exaspere, je ne m'etais donc pas
trompe en vous appelant un pedagogue! Ce ton que vous affectez,
cette forme dont vous faites la votre, est celle d'un jesuite
fouetteur et non celle d'un gentilhomme Quittez donc, je vous
prie, vis-a-vis de moi, cette forme et ce ton. Je hais
M. d'Artagnan parce qu'il a commis une lachete envers mon pere.
-- Vous mentez, monsieur, dit froidement Raoul.
-- Oh! s'ecria de Wardes, vous me donnez un dementi, monsieur?
-- Pourquoi pas, si ce que vous dites est faux?
-- Vous me donnez un dementi et vous ne mettez pas l'epee a la
main?
-- Monsieur, je me suis promis a moi-meme de ne vous tuer que
lorsque nous aurons remis Madame a son epoux.
-- Me tuer? oh! votre poignee de verges ne tue point ainsi,
monsieur le pedant.
-- Non, repliqua froidement Raoul, mais l'epee de M. d'Artagnan
tue; et non seulement j'ai cette epee, monsieur, mais c'est lui
qui m'a appris a m'en servir, et c'est avec cette epee, monsieur,
que je vengerai, en temps utile, son nom outrage par vous.
-- Monsieur, monsieur! s'ecria de Wardes, prenez garde! Si vous ne
me rendez pas raison sur-le-champ, tous les moyens me seront bons
pour me venger!
-- Oh! Oh! monsieur! fit Buckingham en apparaissant tout a coup
sur le theatre de la scene, voila une menace qui frise
l'assassinat, et qui, par consequent, est d'assez mauvais gout
pour un gentilhomme.
-- Vous dites, monsieur le duc? dit de Wardes en se retournant.
-- Je dis que vous venez de prononcer des paroles qui sonnent mal
a mes oreilles anglaises.
-- Eh bien! monsieur, si ce que vous dites est vrai, s'ecria
de Wardes exaspere, tant mieux! je trouverai au moins en vous un
homme qui ne me glissera pas entre les doigts. Prenez donc mes
paroles comme vous l'entendez.
-- Je les prends comme il faut, monsieur, repondit Buckingham avec
ce ton hautain qui lui etait particulier et qui donnait, meme dans
la conversation ordinaire, le ton de defi a ce qu'il disait;
M. de Bragelonne est mon ami, vous insultez M. de Bragelonne, vous
me rendrez raison de cette insulte.
De Wardes jeta un regard sur Bragelonne, qui, fidele a son role,
demeurait calme et froid, meme devant le defi du duc.
-- Et d'abord, il parait que je n'insulte pas M. de Bragelonne,
puisque M. de Bragelonne, qui a une epee au cote, ne se regarde
pas comme insulte.
-- Mais
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