nter pour toucher la prime de
cent florins, le President Miclesco passa sans plus tarder a la liste
des vainqueurs dans la categorie du poids. Les primes furent des
Roumains, des Slaves et des Autrichiens. Lorsque le nom auquel etait
attribue le second prix fut prononce, ce nom fut applaudi comme l'avait
ete celui de l'Allemand Weber. M. Ivetozar, l'un des assesseurs,
triomphait avec un chevesne de trois livres et demie, qui eut assurement
echappe a un pecheur possedant moins d'adresse et de sang-froid. C'etait
l'un des membres les plus en vue, les plus actifs, les plus devoues de
la Societe, et c'est lui qui, a cette epoque, avait remporte le
plus grand nombre de recompenses. Aussi fut-il salue par d'unanimes
applaudissements.
Il ne restait plus qu'a decerner le premier prix de cette categorie, et
les coeurs palpitaient en attendant le nom du laureat.
Quel ne fut pas l'etonnement, plus que l'etonnement, quelle ne fut pas
la stupefaction generale, lorsque le President Miclesco, d'une voix,
dont il ne pouvait moderer le tremblement, laissa tomber ces mots:
" Premier au poids pour un brochet de dix-sept livres, le Hongrois Ilia
Brusch! "
Un grand silence se fit dans l'assistance. Les mains pretes a battre
demeurerent immobiles, les bouches pretes a acclamer le vainqueur se
turent. Un vif sentiment de curiosite immobilisait tout le monde.
Ilia Brusch allait-il enfin apparaitre? Viendrait-il recevoir du
President Miclesco les diplomes d'honneur et les deux cents florins qui
les accompagnaient?
Soudain un murmure courut a travers l'assemblee.
Un des assistants, qui, jusque-la, s'etait tenu un peu a l'ecart, se
dirigeait vers l'estrade.
C'etait le Hongrois Ilia Brusch.
A en juger par son visage soigneusement rase, que couronnait une epaisse
chevelure d'un noir d'encre, Ilia Brusch n'avait pas depasse trente ans.
D'une stature au-dessus de la moyenne, large d'epaules, bien plante sur
ses jambes, il devait etre d'une force peu commune. On pouvait etre
surpris, en verite, qu'un gaillard de cette trempe se complut aux
placides distractions de la peche a la ligne, au point d'avoir acquis
dans cet art difficile la maitrise dont le resultat du concours donnait
une irrecusable preuve.
Autre particularite assez bizarre, Ilia Brusch devait, d'une maniere ou
d'une autre, etre afflige d'une affection de la vue. De larges lunettes
noires cachaient, en effet, ses yeux, dont il eut ete impossible de
reconnaitre la cou
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