a vie a son enfant.
C'est ainsi que, de jour en jour, sans meme qu'ils en eussent
conscience, l'amour s'etait eveille dans le coeur des deux jeunes gens.
Ce fut a Striga qu'ils en durent la revelation.
Celui-ci, ayant apercu celle qu'on appelait couramment la _beaute de
Roustchouk_, s'en etait epris avec la soudainete et la fureur qui
caracterisaient cette nature sans frein. En homme habitue a voir tout
plier devant ses caprices, il s'etait presente chez la jeune fille et,
sans autre formalite, l'avait demandee en mariage. Pour la premiere fois
de sa vie, il se heurta a une resistance invincible. Natcha, au risque
de s'attirer la haine d'un homme aussi redoutable, declara que rien ne
pourrait jamais la decider a un pareil mariage. Striga revint vainement
a la charge. Tout ce qu'il obtint fut de se voir, a la troisieme
tentative, refuser purement et simplement la porte.
Alors sa colere ne connut plus de bornes. Donnant libre cours a
sa nature sauvage, il se repandit en imprecations dont Natcha fut
epouvantee. Dans sa detresse, elle courut faire part de ses craintes a
Serge Ladko, que sa confidence enflamma d'une colere egale a celle qui
venait de l'effrayer si fort. Sans vouloir rien entendre, avec une
violence extraordinaire d'expressions, il vitupera contre l'homme assez
ose pour lever les yeux sur elle.
Ladko consentit pourtant a se calmer. Des explications suivirent, tres
confuses, mais dont le resultat fut parfaitement clair. Une heure plus
tard, Serge et Natcha, le ciel dans les yeux et la joie au coeur,
echangeaient leur premier baiser de fiancailles.
Lorsque Striga connut la nouvelle, il manqua mourir de rage.
Audacieusement, il se presenta a la maison Gregorevitch, l'injure et la
menace a la bouche. Jete dehors par une main de fer, il apprit que la
maison avait desormais un homme pour la defendre.
Etre vaincu!... Avoir trouve son maitre, lui, Striga, qui
s'enorgueillissait tant de sa force athletique!... C'etait plus
d'humiliations qu'il n'en pouvait supporter, et il resolut de se venger.
Avec quelques aventuriers de son acabit, il attendit Ladko, un soir que
celui-ci remontait la berge du fleuve. Cette fois, il ne s'agissait plus
d'une simple rixe, mais bien d'un assassinat en regle. Les assaillants
brandissaient des couteaux.
Cette nouvelle attaque n'eut pas plus de succes que la precedente. Arme
d'un aviron qu'il manoeuvrait comme une massue, le pilote forca ses
agresseurs a la retraite, et Str
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