, en repugnance a
oser, en promptitude a se decourager et a se troubler devant la beaute
superbe. Non, tu n'avais pas tue l'amour dans ton coeur; tu en etais
plutot reste au premier, au timide et novice amour; mais sans la
fraicheur naive, sans l'ignorance adorable, sans les torrents, sans le
mystere; avec la disproportion de tes autres facultes qui avaient muri
ou vieilli; de ta raison qui te disait que rien ne dure; de ta sagacite
judicieuse qui te representait les inconvenients, les difficultes et les
suites; de tes sens fatigues qui n'environnaient plus, comme a dix-neuf
ans, l'etre unique de la vapeur d'une emanation lumineuse et odorante;
ce n'etait pas l'amour, c'etait l'harmonie de tes facultes et de leur
developpement que tu avais brisee dans ton etre! Ton malheur est celui
de bien des hommes de notre age.
[Note 77: Lamartine.]
Farcy se disait pourtant que cette disproportion entre ce qu'il savait
en idees et ce qu'il avait eprouve en sentiments devait cesser dans son
ame, et qu'il etait temps enfin d'avoir une passion, un amour. La tete,
chez lui, sollicitait le coeur; et il se portait en secret un defi, il
se faisait une gageure d'aimer. Il vit beaucoup, a cette epoque, une
femme connue par ses ouvrages, par l'agrement de son commerce et sa
beaute[78], s'imaginant qu'il en etait epris, et tachant, a force de
soins, de le lui faire comprendre. Mais, soit qu'il s'exprimat trop
obscurement, soit que la preoccupation de cette femme distinguee fut
ailleurs, elle ne crut jamais recevoir dans Farcy un amant malheureux.
Pourtant il l'etait, quoique moins profondement qu'il n'eut fallu
pour que cela fut une passion. Voici quelques vers commences que nous
trouvons dans ses papiers:
Therese, que les Dieux firent en vain si belle,
Vous que vos seuls dedains ont su trouver fidele,
Dont l'esprit s'eblouit a ses seules lueurs,
Qui des combats du coeur n'aimez que la victoire,
Et qui revez d'amour comme on reve de gloire,
L'oeil fier et non voile de pleurs;
Vous qu'en secret jamais un nom ne vient distraire,
Qui n'aimez qu'a compter, comme une reine altiere,
La foule des vassaux s'empressant sur vos pas;
Vous a qui leurs cent voix sont douces a comprendre,
Mais qui n'eutes jamais une ame pour entendre
Des voeux qu'on murmure plus bas;
Therese, pour longtemps adieu!.....
[Note 78: Le respect nous empeche de la nommer; mais Beranger l'a
chantee, et tous ses amis la reconnaitront ici so
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