ur en venir secher mes pleurs.
Je demande au soleil de flamme,
Qui boit la seve et fait les vins,
Qu'il aspire toute mon ame,
Et la verse a tes pieds divins!
et qui sont presque traduits d'une de nos belles chansons toulousaines.
Oui, je me sentais l'esprit alerte et dispose a d'aimables confidences.
Ah! maudite fenetre! Pourquoi es-tu venue tout bouleverser dans mon
cerveau?
* * * * *
Je regarde dans mon jardin. Tout y celebre encore la gloire de l'ete
triomphant. C'est d'un horizon sans brumes que le soleil a jailli,
precede par un grand rayonnement d'or dans l'espace, comme un ostensoir
immense montant des mains obscures d'un levite inconnu. Aucune
inquietude dans le vol des hirondelles qui se perdent, points
invisibles, dans les infinis de l'azur. Les peupliers tres verts
decoupent sur le ciel leurs fuseaux vivants, et les tilleuls, masses
odorantes, y enchevetrent, comme des troupeaux, leurs dos moutonnants.
Tout est joie dans mon parterre. Des roses en boutons y consolent la
detresse des roses defleuries; de la tige de mes glaieuls, comme d'une
veine ouverte en plusieurs endroits, jaillissent de belles fusees de
sang clair; une constellation d'oeillets s'eparpille dans les bordures,
et mes cheres acanthes pyreneennes epanouissent leurs larges feuilles
architecturalement dechiquetees comme des souvenirs dont l'ombre
enveloppe l'ame. La gaiete vorace des oiseaux s'acharne aux prunes
encore fermes et aux abricots qui tombent en se fendant d'une large
blessure aux levres pourprees. Je devine, derriere ce rideau riant, le
fleuve tranquille et tiede ou les barques glissent entre les calices
odorants des nenuphars, ou les pecheurs matinaux guettent, patients,
l'ablette, encore paresseuse de ses printanieres amours, au pied des
joncs qui bordent la rive. Tout semble d'une eternelle serenite dans ce
paysage ou rien ne menace, des coleres du ciel ou des caprices de l'eau
sous le vent qui la fouette....
Ah! maudite feuille, de quoi es-tu venue me parler?
* * * * *
Car j'ai beau te faire crepiter sous la pointe rageuse de mon canif,
je ne pourrai aneantir, avec toi, le symbole que tu portes, le mauvais
presage dont ton aile etait chargee. Dans cette orgie radieuse des
choses sous la tendresse caressante du soleil, tu es tout simplement
le _mane, thecel, phares_ apparaissant sur l'obscurite des murailles
lointaines faites des orages amonce
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