rose fleurit toujours pour
vous dans le jardin derobe de mes reves, une rose immortelle dont la
racine est au profond douloureux de mon coeur.
Quelque chose de fraternel pleure en moi sur ce desespere des floraisons
defaillantes, venu trop tard pour la gloire des epanouissements et
pareil a l'amour tardif qui compte moins les bonheurs a venir que
l'inutile tresor des bonheurs perdus!
IV
OEILLETS ROUGES
L'oeillet d'automne est sans parfums.
Sous l'orgueil de ses pourpres vaines,
Il semble porter dans ses veines
Le sang glace des coeurs defunts.
Fleur sans parfum, ame sans reves!
Oiseaux sans ailes, toutes deux,
Dont jamais les vols hasardeux
Pour les cieux n'ont quitte les greves.
Malgre ses velours eclatants
Dont ton regard charme s'etonne,
Ne cueille pas l'oeillet d'automne,
Toi dont le coeur est tout printemps!
Toi dont l'etre est tout envolee
Vers les firmaments apaises,
Ou monte l'odeur des baisers
A l'odeur des roses melee.
Si c'est du rouge que tu veux
Pour eclairer leur ombre, impregne
De mon sang la fleur que ton peigne
Tient mourante dans tes cheveux,
Et par les souffles embaumee
Autour de ton etre flottants,
Toi dont la grace est tout printemps.
Vivant Avril, ma bien-aimee!
L'oeillet d'automne est sans parfums.
Sous l'orgueil de ses pourpres vaines,
Il semble porter dans ses veines
Le sang glace des coeurs defunts.
[Illustration]
[Illustration]
SUPER FLUMINA
J'ai garde certaines habitudes dominicales de mon enfance, et c'est
comme malgre moi que, tous les huit jours, un acces de paresse qu'aucune
fatigue n'excuse me pousse vers quelque promenade sans but, vers quelque
flanerie a l'aventure, dans la campagne ou meurt le tintement des
cloches lointaines, a l'heure ou les derniers fideles franchissent les
porches des eglises avec une fade odeur d'encens dans leurs habits. Ce
sont mes vespres que je dis ainsi en pleine nature, egrenant sur ma
route le chapelet des souvenirs, fervents de tous les cultes oublies,
levite de toutes les religions meprisees, supreme croyant de toutes les
croyances dechues.
Ainsi, il y a deux jours, m'en allai-je le long du fleuve, qu'un vent de
bise ridait, sur une rive a peu pres deserte, suivant le quai dont la
pierre limee par les cordes des halages se dentelait sous l'usure, dans
un de ces paysages de banlieue que Rafaelli excelle si bien a decrire
et dont le ciel est
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